Projet archéologique du fort Nieu Savanne : des fouilles au vieux fort

Jean-Luc Pilon

Ce billet est le cinquième d’une série rédigée par l’archéologue Jean-Luc Pilon dans le cadre du projet de recherche archéologique du fort Nieu Savanne.

Les fouilles archéologiques réalisées à Gllw-1 en août 2016 visaient avant tout à examiner la possibilité d’une présence européenne près du campement autochtone de l’Aire B de Gllw-1. David Christianson avait mené des travaux dans l’Aire A du même site en 1980, à l’emplacement même du fort de la Compagnie de la Baie d’Hudson, construit en 1685. Ses fouilles avaient soulevé des questions importantes qui subsistent.

Par exemple, Christianson avait découvert des os d’animaux. Après examen, ces os ne révélèrent pour la plupart aucun signe du feu cataclysmique qui, en 1690, avait non seulement rasé le poste de traite de fourrures, mais également entraîné la fonte ou la déformation des artefacts de divers types (verre, métal, céramique) retrouvés à cet endroit. Pourquoi les os d’animaux avaient-ils été épargnés par les ravages des flammes?

Une explication plausible serait que le « vieux fort », l’appellation populaire du Fort Severn, aurait servi à d’autres fins. Dans les décennies qui ont suivi sa destruction, le fort a peut-être été un lieu de passage permettant aux chasseurs et à leurs familles d’effectuer de courts séjours sur une terre haute, bien drainée et au sol relativement plat. Selon une autre hypothèse, les Européens auraient pu vivre là où se trouvait le campement autochtone et utiliser le vieux fort pour se débarrasser de leurs déchets, y compris les os des animaux assurant leur survie, essentiellement des caribous, des canards et des oies.

Recherches archéologiques le long du cours inférieur de la rivière Severn. Musée canadien de l’histoire, photo : Jean-Luc Pilon, IMG1609

Recherches archéologiques le long du cours inférieur de la rivière Severn. Musée canadien de l’histoire, photo : Jean-Luc Pilon, IMG1609

Avec ces questions à l’esprit, nous avons tenté de retrouver les unités de fouille de Christianson en nous fiant à la carte du site en question qu’il avait dressée lors de ses travaux. Malheureusement, le site du « vieux fort » s’est embroussaillé et est devenu impraticable. Lentement et inexorablement, la nature a réclamé son dû et effacé les traces de l’histoire humaine. Nous avons établi une unité de fouille de 50 cm sur 2 m. Nous voulions ainsi vérifier si l’hypothèse d’une seconde occupation du vieux fort pouvait être confirmée par la stratigraphie (l’étude de la succession des couches géologiques et de leur contenu en artefacts archéologiques).

Cela s’est avéré un défi de taille. Les sols à étudier étaient beaucoup plus profonds, et leur composition beaucoup plus complexe que prévu. La tranchée étroite que nous avions creusée ne pouvait à elle seule répondre à nos questions. En fin de compte, le temps et le pergélisol nous ont obligés à interrompre nos travaux.