COUTUMES ANCIENNES, VISIONS NOUVELLES Connaissances traditionnelles dans la région du delta du Mackenzie, T.N.-O. (transcription textuelle) Capsule patrimoniale de la vallée du Mackenzie Montage et direction: Lori J. Schroeder Rédaction et production: Jean-Luc Pilon Une production du Musée canadien des Civilisations, Hull, Québec. Février 1996. (Narrateur): "Les bibliothèques sont des centres importants. On peut y trouver toutes sortes de renseignements, des châteaux européens du Moyen-Âge jusqu'au premier voyage sur la lune. Les livres sont précieux; on les respecte et on en prend soin. C'est de cette façon qu'on apprend; c'est de cette façon qu'on construit sur ce que les générations antérieures ont accompli avant nous. Mais les livres et les bibliothèques sont des additions récentes aux moyens que les gens ont utilisés pour satisfaire le besoin de transmettre les connaissances pratiques. Pendant des milliers d'années, le souvenir des événements et les instructions se sont transmis verbalement par l'intermédiaire des légendes et des histoires. En fait, c'est encore le cas aujourd'hui." (Noel Andre): "Henjuu signifie simplement une rangée d'arbres au bord du ruisseau et deh'la, Henjuu deh'tla, çà signifie si vous regardez bien quelques-uns de ces ruisseaux, ils ressemblent à une corde et tshik çà signifie à l'embouchure." (Narrateur): "Au début des années 90, on a mis plusieurs projets en marche dans la vallée du bas Mackenzie et dans la région de la Mer de Beaufort/delta du Mackenzie, projets qui s'adressaient aux connaissance traditionnelles; plus particulièrement à leur compilation et à leur sauvegarde pour les générations futures." (Gabe Andre): "Teh'deh'tcha c'est celui qui s'est fait tuer ici, tu sais. Y a tué tellement d'Esquimaux. Ils dormaient dans le fumoir et au même moment ils l'entouraient. Y devaient être 10, 15, qui l'ont empoigné pendant son sommeil. Sa belle-mère était là avec cette alène alors que les Esquimaux luttaient avec lui, en le maintenant à terre, l'a piqué dans le dos avec ce t'sa. Il en tua la moitié. Eux-mêmes, ils en ont fait une histoire. Teh'deh'tcha. Gee'na'mon'tong'tcho qui signifie "Est-ce toi?". Ils avaient l'habitude de tuer beaucoup de nos gens. C'était juste ici." (Murielle Nagy): "Nous avons recueilli des histoires réellement vécues, des expériences de vie, au gré du souvenir des gens. On a obtenu quelques histoires qui leur avaient été racontées par leurs parents. Mais, en grande partie, c'était des histoires racontant le mode de vie des gens habitant un endroit bien spécifique. Nous y retrouvons donc les souvenirs de leur propre enfance vécue dans le versant nord du Yukon et à l'île Hershel. Nous apprenons comment les gens subsistaient. comment ils faisaient la chasse au caribou, la chasse au phoque, la chasse à la baleine. Nous apprenons comment ils construisaient leurs maisons des choses comme çà... Nous apprenons aussi que la tradition orale avait sa place, dans le sens qu'on racontait jadis des histoires sur les gens qui avaient auparavant vécu dans ces endroits. Des histoires du genre..." (Alestine Andre): "Je suis étonnée de la connaissance que les gens ont de leur territoire; le nom des endroits, les ressources disponibles, les anecdotes qui sont rattachées à quelques-uns de ces noms. Mais si vous faites une tournée avec les aînés, vous pouvez sans aucun doute vous rendre compte qu'ils savent comment vivre de la terre, ils savent comment survivre dans leur territoire. Un hache coupante est importante, un bon couteau est important, tu sais toutes ces choses, p'tites choses qui te disent que c'est une bonne personne pour t'accompagner en forêt, que ce soit un homme ou une femme. Tu sais, les connaissances qu'ils ont accumulées dans leur vie, leurs expériences racontées dans leurs histoires et démontrées. J'ai une telle admiration pour eux et je pense "expert" est un bon nom pour eux." "Le projet que nous avons réalisé l'été dernier était principalement centré sur un projet spécifique. On avait des questions spécifiques à demander aux experts ou aux aînés à qui on a parlé et çà concernait principalement les sentiers et les campements aussi bien que les ressources disponibles dans une région donnée aussi bien que des noms d'endroits et des histoires pertinentes reliées à ces noms d'endroits." (Ingrid Kritsch): "Ils ont une perception tellement très très étroite, les gens dans les villes. Et je crois que, quand tu viens ici sur place, on a une bien meilleur idée de ce en quoi consiste vraiment leur culture. Lorsqu'on voit les gens dans leur propre milieu, c'est là qu'on comprend qu'ils disposent de tout u baggage de connaissances reliées à la terre parce qu'ils en vivent. Les aînés au moins, ont vécu de la terre pour, ben, toute leur vie." (Elisa Hart): "Nous espérons produire un livre qui fournira une liste des sites patrimoniaux avec leurs histoires entremêlées à l'information technique et archéologique de telle sorte qu'on aura quelque chose qui pourrait être utilisé à l'école. Un autre bienfait c'est que toutes les bobines d'enregistrement vont aux archives territoriales, les Archives des Territoires du Nord-Ouest, et sont sauvegardées pour les générations futures. Et c'est vraiment, il semble très important aux aînés de penser que leur arrière arrière petits enfants pourront aller aux Archives et écouter leur voix, les écouter raconter des histoires au sujet de leur vie traditionnelle, c'est important pour eux." (Naudia Lennie): "Ces enregistrements sont très importants, oui, et nous en sommes très heureux de les avoir, mais je crois que ce qui est plus important encore c'es d'écouter les aînés d'aujourd'hui. Sortez, allez à leur rencontre, allez leur parler, écoutez ce qu'ils ont à dire. Et si vous ne comprenez pas leur langue, apprenez-la. Vous êtes bien assez jeunes pour l'apprendre. C'est aussi simple que çà. J'entends presque les jeunes dire: "Mais oui, mais oui, mais comment voulez-vous qu'on apprenne çà!!" Alors moi je leur dis que c'est en prenant le temp, tout simplement. "Sortez des arcades! Laissez tomber les détails anodins de la vie d'ados et commencez à y consacrer du temps! Voilà, voilà ce que vous pouvez donner à la vie, vous pouvez donné de votre temps aux aînés. C'est aussi simple que celà" (Gabe Andre): "Si j'avais su, ce qui va arriver aujourd'hui, j'aurais posé des questions pour le savoir. Dans cent ans, vous n'obtiendrez plus jamais de réponses à ce sujet. Mais maintenant, çà disparaît. Çà va devenir de plus en plus dur. Mais ce que je sais maintenant, c'est grâce aux aînés qui me racontent des histoires parfois et je les écoute. Mais je savais ne pas que dans 40 ans il va y avoir quelqu'un pour me poser des questions à ce sujet; des choses comme çà. C'est dommage que personne n'ait écrit un livre, eh, il y a à peu près cent ans."