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  Magasin Dupuis Frères, 1877.  
  

Agrandir l'image.Le magasin Dupuis Frères, Montréal, 1877. Le magasin, fondé en 1868 par Nazaire Dupuis et situé à l'angle des rues Sainte-Catherine et Berri, à Montréal, fermera ses portes en 1978. Gravure parue dans L'Opinion publique, 9 novembre 1877.

  
     

Dupuis Frères
Texte de Marguerite Sauriol

Originaires de Saint-Jacques-de-l'Achigan, au Québec, les Dupuis, comme bien d'autres familles, débarquent à Montréal en 1864, à la recherche de la fortune et d'une façon nouvelle de subvenir à leurs besoins. Quatre ans plus tard, Nazaire Dupuis, le fils aîné, ouvre un petit magasin qui allait devenir un commerce florissant.

Le comptoir postal | Le catalogue | Le déclin | La fermeture | Sources documentaires


En 1870, le magasin prend le nom de Dupuis Frères, puis celui de Dupuis Frères Limitée, en 1908, au moment où il se constitue en société à responsabilité limitée et obtient une charte fédérale. Entre ces dates, la compagnie traverse plusieurs périodes difficiles. Ainsi, en 1897, suite à de mauvais investissements, Odilon Dupuis est contraint de vendre le commerce à son frère Narcisse. La conjoncture économique favorable qui précède la Première Guerre mondiale permet à la compagnie de retrouver sa rentabilité. On recrute trois nouveaux gérants chez des concurrents, dont un certain A.-J. Dugal, qui demeurera au sein du personnel cadre durant 40 années. Dès les années 1920, le magasin est reconnu comme l'un des deux ou trois plus grands de Montréal. Le développement de l'entreprise familiale est en effet impressionnant. En peu de temps, elle devient le carrefour commercial des francophones de la ville.

Dupuis Frères fait la fierté des consommateurs canadiens-français. Pour obtenir cette reconnaissance, l'entreprise familiale joue sur ses origines canadiennes-françaises dans sa stratégie de mise en marché. Elle fait directement appel au sentiment de fierté des francophones. Ainsi, en 1927, on peut lire, dans Le Duprex, la revue des employés, ces propos empreints de chauvinisme :

  Dupuis Frères automne hiver 
1932-1933, 
page de couverture.  
  

Agrandir l'image.Page de couverture du catalogue Dupuis Frères, automne-hiver 1932-1933. Le propos de cette page illustre bien le discours patriotique sur lequel la compagnie base sa stratégie de marché.

  
     

« Dans un pays comme le nôtre, submergé par l'immigration, encerclé par la finance américaine, anglaise ou juive, nous n'avons pas le droit d'être quelconques, médiocres, inférieurs, et de nous résigner à demeurer perpétuellement des scieurs de bois et des porteurs d'eau, des serviteurs obséquieux et craintifs. »

Aussi, au cours des années 1930 et 1940, la compagnie participe-t-elle pleinement aux campagnes d'achat chez nous qui visent à encourager les entreprises canadiennes-françaises.

Un autre élément va favoriser le développement et la popularité de l'entreprise Dupuis Frères  : la vente par correspondance. Grâce à l'implantation d'un comptoir postal, elle voit sa réputation s'étendre partout au Québec et même à l'extérieur de la province.


Le comptoir postal

  75e anniversaire, Dupuis Frères 
printemps été 1943, page de couverture.  
  

Agrandir l'image.Page de couverture du catalogue Dupuis Frères, printemps-été 1943. Cette édition marque le 75e anniversaire de la compagnie. Ses deux imposants édifices, le grand magasin de la rue Sainte-Catherine et le comptoir postal de la rue Brewster, témoignent du succès de l'entreprise.

  
     

Le comptoir postal est inauguré en 1921. Au total, 20 000 exemplaires du catalogue, d'une trentaine de pages, sont alors mis en circulation. La publication, rédigée uniquement en français, présente plus de
500 articles. En 1942, c'est plus d'un million de catalogues qui seront distribués. Vers la fin des années 1940, des bureaux de commandes postales sont ouverts dans plusieurs villes de la province : Jonquière, La Tuque, Rimouski, Rivière-du-Loup,
Sept-Îles et Val-d'Or.

   Étiquette de colis de Dupuis 
Frères.   

Étiquette de colis de Dupuis Frères. Le slogan de cette étiquette, utilisée par le comptoir postal de la compagnie, « Reçue AUJOURD'HUI - Expédiée AUJOURD'HUI », reflète bien la qualité de son service, son efficacité et sa rapidité.

Agrandir l'image.
 
  Voiture à cheval de livraison 
de 
Dupuis Frères, 1932.  
  

Agrandir l'image.Voiture de livraison de Dupuis Frères. Cette voiture à cheval sera utilisée jusqu'au milieu des années 1920, alors qu'elle sera remplacée par le camion. Le Duprex, volume 6, numéro 4, janvier 1932, p. 45.

  
     

Dès le début des années 1930, le bureau de commandes postales reçoit jusqu'à 10 000 requêtes par jour. On déménage les activités du comptoir postal dans un édifice plus spacieux, situé dans le quartier Saint-Henri. On y installe une nouvelle centrale permettant de prendre des commandes par téléphone. Le Duprex proclame avec fierté que la maison est connue « d'un océan à l'autre par son commerce postal ».

Un document de la Royal Commission on Price Spreads and Mass Buying, publié en 1934, révèle cependant que, malgré cette image de réussite, Dupuis Frères a connu des déficits. On y trouve le chiffre d'affaires annuel de la compagnie de 1925 à 1934. D'après l'enquête, les statistiques des ventes fournies pour la division du comptoir postal font état de pertes pour chaque année. Par exemple, pour 1928, celles-ci se chiffrent à 9800 $ et à 68 000$ pour 1934. Un phénomène analogue est d'ailleurs observé dans les statistiques de la compagnie Simpson. La crise économique qui sévit à ce moment-là s'avère l'un des facteurs responsables de ces opérations déficitaires.


Le catalogue

Les différentes éditions du catalogue de Dupuis Frères proposent un vaste choix d'articles de tous genres : vêtements pour chaque membre de la famille, lingerie, sous-vêtements, médicaments, accessoires ménagers, entre autres, cuisinières et fers à repasser électriques. On y offre aussi des articles religieux, bien que cette catégorie soit plutôt présentée dans un catalogue destiné spécifiquement aux membres du clergé. Le catalogue offre aussi des articles de sport. Ainsi, chaque année, l'édition automne-hiver présente de l'équipement de hockey; l'édition printemps-été propose les accessoires de base-ball. Les ventes de certaines catégories d'articles dépendent donc directement des saisons et du succès de l'entreprise auprès de sa clientèle. Ainsi, dans l'édition automne hiver 1952-1953, les sous-vêtements, particulièrement la combinaison pour hommes, constituent une catégorie d'articles très en demande. La vente de 6000 sous-vêtements (combinaisons, camisoles et caleçons) totalisera 19 300 $. Celle de
260 manteaux et complets pour hommes rapportera 16 700  $ à la compagnie pour la même période.

C'est toutefois l'attention des consommatrices que le catalogue cherche à attirer. Les pages illustrant les vêtements féminins sont en effet plus nombreuses et plus frappantes. Cette section comporte davantage de pages utilisant la couleur que n'importe quelle autre partie de la publication.


Le déclin

Malgré la reprise économique de l'après-guerre, les années 1950 et 1960 demeurent difficiles pour Dupuis. Celle-ci met de nouvelles stratégies de marketing à l'essai; elle tente de rajeunir son image. Peine perdue. Les multiples affrontements reliés à la grève de 1952 vont ébranler la confiance que patrons, employés et clients ressentaient à l'endroit de la maison. La compagnie voit alors son chiffre d'affaires péricliter; le comptoir postal prend du retard de sorte qu'il cessera ses activités en janvier 1963, quelques mois après la parution du dernier catalogue. En 1964, grèves et lock-out vont de nouveaux perturber les activités du magasin. Les problèmes financiers s'accumulent et la maison Dupuis Frères fermera ses portes en 1978. L'entreprise n'appartenait plus à la famille depuis 1961.

   La grève chez Dupuis 
Frères, 1952.   

La grève de 1952 chez Dupuis Frères. Des officiers de la police à cheval de la ville de Montréal maintiennent l'ordre face aux grévistes.

Agrandir l'image.

La fermeture

Les facteurs responsables de la fermeture sont multiples  : la localisation du magasin, à l'est de la rue Berri, l'édifice se trouvant isolé des autres grands magasins du centre-ville; la concurrence et, enfin, la baisse du taux de fidélité de la clientèle francophone qui s'est tournée graduellement vers d'autres entreprises de la rue Sainte-Catherine ou les centres d'achats des banlieues.

Quand, en 1978, la compagnie Dupuis Frères doit se placer sous la protection de Loi sur la faillite et l'insolvabilité et ferme ses portes, elle congédie plus de 700 employés d'un coup, sans leur accorder la moindre indemnisation. Les créanciers sont nombreux et ce sont les employés qui seront servis les derniers. Ce n'est en effet que beaucoup plus tard, en novembre 1989, que les ex-employés toucheront une certaine indemnisation. Puis, en février 1990, ils recevront finalement leur compensation. Ainsi disparaît une entreprise qui se voulait le fer de lance des ambitions économiques de la « race » canadienne-française.

 


Sources documentaires

DUPUIS-LEMAN, Josette. Dupuis Frères, le magasin du peuple. Montréal, Stanké, 2001, 290p.

Fonds d'archives de Dupuis Frères Limitée1868-1978, Montréal, École des hautes études commerciales de Montréal, HEC, P049.

LEFEBVRE, Jean-Marie. « Nazaire Dupuis ». Dictionnaire biographique du Canada, vol. X. : 1871 - 1880. Québec, Presses de l'Université Laval,
p. 289-290.

MATTHEWS, Mary Catherine. « Working for family, nation and God : p

Paternalism and the Dupuis Frères department store, Montreal, 1926-1952 ». Mémoire de maîtrise, Montréal, Université McGill, 1998, 118f.

TRUDEL, Robert. « Famille, Foi et Patrie : le credo de Dupuis Frères ».
Cap-aux-Diamants
, n° 40, hiver 1995, p. 26-29.

 

 

   
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