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Du sur mesure au prêt-à-porter - Le vêtement féminin dans le catalogue d'Eaton, de 1884 à 1930 (page 2)

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Introduction | « Tout pour faire vos propres vêtements » | « … ou nous le ferons pour vous. » | « Des corsets aux collets : le moins cher et le meilleur » | « Des robes de maison et d'après-midi conçues pour être seyantes » | « Voici la Boutique ! » | Conclusion | Sources documentaires


« Des corsets aux collets : le moins cher et le meilleur »

Dans ses premiers catalogues, Eaton admet que la plupart des vêtements et des chapeaux sont faits sur mesure - à la maison ou à l'atelier -, mais il offre tout de même des pièces spécialisées toutes faites, difficiles à coudre, par exemple les gants, les bas, les corsets et les collets, ainsi que des vêtements qui n'exigent aucun ajustement, comme les vestes, les capes et les sous-vêtements.

  Le rayon des corsets, Eaton's Fall 
Winter 1899-1900, p. 63.  
  

Agrandir l'image.Au rayon des corsets. 1899. Le corset avec taille sanglée et plein buste crée la silhouette à la mode des années 1890. Catalogue d'Eaton, automne-hiver 1899-1900, p. 63.

  
     
  Pèlerines pour dames, Eaton's 
Spring 
Summer 1895, p. 13.  
  

Agrandir l'image.Six capes élégantes. 1895. Catalogue d'Eaton, printemps-été 1895, p. 13.

  
     
  Sous-vêtements pour dames, 
Eaton's 
Fall Winter 1895-1896, p. 38.  
  

Agrandir l'image.Quelques sous-vêtements féminins. 1895. Les sous-vêtements comprennent les protège-corsets, les chemises, les culottes et les jupons. Catalogue d'Eaton, automne-hiver 1895-1896, p. 38.

  
     

Quand le magasin crée son catalogue, en 1884, il existe déjà plusieurs manufactures canadiennes qui produisent ces vêtements. Eaton importe également, des États-Unis et de Grande-Bretagne, des sous-vêtements prêts-à-porter et des accessoires.

Eaton comprend que beaucoup de ses clientes n'ont pas l'habitude de commander des vêtements par la poste sans les examiner. Dans le catalogue, il leur promet donc qu'elles obtiendront non seulement des articles de qualité aux plus bas prix, mais à la toute dernière mode : « Un personnel de jeunes dames, au goût sûr en matière de mode, s'affaire, votre lettre en main, jusqu'à ce que votre commande soit entièrement remplie, et donne aux acheteuses éloignées l'avantage d'une connaissance approfondie des modes dernier cri. Elles magasineront pour vous mieux que vous-même le feriez. »

  Les corsets Acme, Eaton's Fall Winter 
1907-1908, p. 139.  
  

Agrandir l'image.Les corsets de marque ACME. 1907. Ces corsets sont « manufacturés et vendus exclusivement par Eaton. » Remarquez la nouvelle silhouette à la mode, inclinée vers l'avant, et le large buste. Catalogue d'Eaton automne-hiver 1907-1908, p. 139.

  
     

Eaton possède un avantage sur ses concurrents dans l'offre de ces vêtements. Il propose une variété de marchandises beaucoup plus grande que les magasins spécialisés des villes ou des magasins généraux des régions rurales. Ses produits sont également moins chers. L'entreprise achète directement du manufacturier, évitant l'intermédiaire. Dès les années 1890, elle réduit encore les coûts en créant ses propres manufactures : « Nous contrôlons la confection des vêtements dans nos propres manufactures. Chaque étape jusqu'à la finition et à la livraison des vêtements chez vous vise à vous faire
économiser. »

Contrairement à bien des magasins qui acceptent de faire crédit, Eaton s'unit à d'autres détaillants progressifs pour offrir une politique de remboursement : « Notre garantie d'articles satisfaisants ou l'argent remis avec tous les frais de transport. » Aujourd'hui, nous avons l'habitude de retourner nos achats contre remboursement mais, à la fin du dix-neuvième siècle, ce service témoignait de l'audace des détaillants et séduisait les clients.


« Des robes de maison et d'après-midi conçues pour être seyantes »

À la fin du dix-neuvième siècle, sous-vêtements, manteaux et accessoires prêts-à-porter sont offerts sur le marché, mais robes et tailleurs sont toujours faits à la maison ou confectionnés chez une couturière. Lentement mais sûrement, Eaton convainc ses clientes d'acheter leurs robes, puis tout leur habillement par catalogue.

Le grand magasin commence, dans les années 1890, à proposer des robes de jour décontractées, appelées « robes de maison ». Il s'agit de modèles d'une seule pièce, qui tombent librement des épaules et qu'on ressert à la taille par une ceinture ou un cordon. Ces robes sont conçues pour être portées à la maison. Une version un peu plus chic, la robe d'après-midi, est portée pour recevoir des amies. Comparativement aux 20 mesures et plus qu'exigent les vêtements faits sur demande, seules la mensuration du buste et la longueur sont nécessaires pour les robes de maison et d'après-midi.

   Robes de chambre pour femmes et 
fillettes, Eaton's Fall Winter 1895-1896, p. 26.   

Robes pour femmes et fillettes. 1895. Bien que ces robes soient plus ordinaires qu'une tenue de soirée, elles conservent les larges manches à la mode et une petite tournure sous la jupe. Catalogue d'Eaton, automne-hiver 1895-1896, p. 26.

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   Robes de chambre et 
d'après-midi, 
Eaton's Spring Summer 1901, p. 12.   

Collage de têtes ! 1901. Remarquez l'introduction d'illustrations qui combinent une photo de tête et un dessin de corps. Catalogue d'Eaton, printemps-été 1901, p. 12.

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Dans un article de 1898 intitulé « Tenues prêtes à porter », Eaton affirme à ses clientes que ces vêtements sont la voie de l'avenir : « Toutes les femmes les adopteront tôt ou tard. Il n'y a aucune raison de ne pas acheter, tout faits, les tailleurs et les robes de maison et les porter avec satisfaction. »

À la fine pointe, Eaton explique aussi que les articles sur mesure sont maintenant rétrogrades puisque les manufactures produisent toutes sortes d'articles tout faits, prêts à acheter  : « Dans le passé, souliers et sous-vêtements, chapeaux et vestes étaient faits sur mesure, comme l'étaient vos meubles par un ébéniste. La vie s'écoulait alors au ralenti et des idées confuses embrouillaient le commerce. »

  Chemisiers, Eaton's Spring Summer 
1902, p. 22.  
  

Agrandir l'image.Des chemisiers pour tous les goûts. 1902. Catalogue d'Eaton, printemps-été 1902, p. 22.

  
     

Un autre vêtement qui se prête fort bien aux incursions du prêt-à-porter est le « haut » ou la blouse. Ce vêtement décontracté devient très populaire chez les femmes qui osent sortir de la maison et vaquer à de nouvelles occupations, comme les dactylographes et les téléphonistes. En outre, puisque les femmes commencent à pratiquer des sports, le tennis et la bicyclette, par exemple, elles ont besoin de vêtements lavables plus confortables.

Des blouses, faites de coton solide, sont les plus décontractées et sont conçues pour ressembler à des chemises d'hommes. Elles se vendent habituellement à moins de 1 $. Les blouses plus luxueuses, en soie et en coton fin (batiste), coûtent de 1,50 $ à 3 $. Une blouse blanche, jumelée à une jupe en laine noir uni, devient le style caractéristique de la femme au travail. En outre, à 4,50 $, cette tenue est abordable.

   Ensemble de printemps, Eaton's Spring 
Summer 1908, p. 26.   

Ensembles de printemps pour jeunes filles. 1908. « Nos modistes font de fréquentes visites pour rapporter le dernier cri de Londres, Paris et New York. » Catalogue d'Eaton, printemps-été 1908, p. 26.

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« Voici la Boutique ! »

Eaton ne tarde guère à se lancer dans la vente de prêt-à-porter chic. Dès le début du vingtième siècle, le catalogue présente des illustrations de tailleurs prêts-à-porter pour les excursions ou les activités sportives. Contrairement aux tailleurs offerts par le service sur mesure, on les achète déjà faits.

  Robes pour dames, Eaton's Spring 
Summer 1899, p. 10.  
  

Agrandir l'image.Tenues sportives. 1899. Même la bicyclette exige un costume ajusté et un chapeau sur mesure. Catalogue d'Eaton, printemps-été 1899, p. 10.

  
     
  Robes d'été pour dames, 
Eaton's Spring 
Summer 1902, p. 9.  
  

Agrandir l'image.Robes d'été. 1902. Catalogue d'Eaton, printemps-été 1902, p. 9.

  
     

Les clientes envoient leurs mesures et Eaton choisit la taille la plus proche. À l'époque, la variété de tailles à choisir était plus grande qu'aujourd'hui et chaque détaillant avait ses propres normes pour les tailles. Eaton reconnaît l'importance de l'ajustement pour la femme à la mode. Jusqu'en 1915, les vêtements féminins sont parfaitement ajustés à la forme du corset et quelque ampleur aurait gêné. Des mesures exactes étaient essentielles.

L'évolution de la mode après la Première Guerre mondiale accélère l'acceptation du prêt-à-porter féminin. La robe corsetée à la taille, bien dessinée, fait place à une forme mince et simplifiée, qui culmine avec la tunique « délurée » des années 1920. Il n'est plus nécessaire d'ajuster les robes au corps - ou plutôt au corset. Elles tombent librement des épaules et, par conséquent, la taille perd de son importance. En 1918, les femmes n'ont plus besoin d'envoyer leurs mensurations, mais peuvent choisir la couleur et la taille d'après un tableau normalisé, comme ceux d'aujourd'hui.

 

  Robes de style, Eaton's Fall Winter 
1918-1919, p. 33.  
  

Agrandir l'image.Changement de silhouette. 1918. Durant la dernière année de la Grande Guerre, la silhouette à la mode se modifie radicalement, avec « des lignes sobres pour conserver patriotiquement autant de tissu que possible ». Catalogue d'Eaton, automne-hiver 1918-1919, p. 33.

  
     
  Corsets, Eaton's Spring Summer 1919, 
p. 141.  
  

Agrandir l'image.Nouveaux modèles de corsets. 1919. Les nouveaux corsets allongent la silhouette. Catalogue d'Eaton, printemps-été 1919, p. 141.

  
     
  Jolies robes, Eaton's Spring Summer 
1925, p. 25.  
  

Agrandir l'image.Se donner une allure jeune. 1925. L'allure jeune est à la mode. Catalogue d'Eaton, printemps-été 1925, p. 25.

  
     
     
  Corsets, Eaton's Spring Summer 1925, 
p. 107.  
  

Agrandir l'image.Tenues de camouflage. 1925. Pour une allure jeune, il faut camoufler la largeur des hanches. Catalogue d'Eaton printemps-été 1925, p. 107.

  
     
  La boutique de robes, Eaton's Fall 
Winter 1929-1930, p. 20.  
  

Agrandir l'image.Un large éventail de tailles. 1929. Remarquez les tailles : de 14 à 20 (buste : de 32 à 38 pouces). Catalogue d'Eaton, automne-hiver 1929-1930, p. 20.

  
     
  Prise des mesures, Eaton's Fall Winter 
1918-1919, p. 547.  
  

Agrandir l'image.La mathématique des mesures masculines et féminines. 1918. Catalogue d'Eaton, automne-hiver 1918-1919, p. 547.

  
     
  Ensemble de ville pour dame, Eaton's 
Fall Winter 1930-1931, p. 2.  
  

Agrandir l'image.La rayon de la vente par correspondance du magasin de Toronto. 1930. Catalogue d'Eaton, automne-hiver 1930-1931, p. 2.

  
     

Les pages de la mode prêt-à-porter se multiplient rapidement; la section sur les articles de couture diminue et on la relègue aux dernières pages. De plus en plus de femmes achètent leurs vêtements tout faits. Le catalogue du grand magasin comble tous leurs besoins vestimentaires.

Dans les années 1920, la chapellerie subit la même évolution par l'introduction de la cloche. Au lieu de la structure en fils métalliques compliquée des lourds chapeaux de la Belle Époque, la cloche est faite d'un simple cône à peine orné. La cloche est parfaite pour la production manufacturée. Dans le catalogue, la section de chapellerie propose des styles baptisés de leurs propres noms que les femmes peuvent commander, car ils sont prêts à porter. En 1923, Eaton élimine son service de commande de chapeaux sur mesure et ferme ses ateliers de chapellerie.

  Chapeaux Bob-O-Links, Eaton's Fall 
Winter 1924-1925, p. 104.  
  

Agrandir l'image.Une forme nouvelle de chapeau pour une coiffure nouvelle. 1924. Les jeunes femmes font tailler leurs cheveux au carré. Catalogue d'Eaton, automne-hiver 1924-1925, p. 104.

  
     
  Chapeaux d'automne, Eaton's Fall 
Winter 1925-1926, p. 63.  
  

Agrandir l'image.Une gamme de chapeaux à prix très abordable. 1925. La production peu coûteuse de chapeaux en manufacture permet à une femme de s'en offrir plusieurs par année. Catalogue d'Eaton, automne-hiver 1925-1926, p. 63.

  
     

Avec la simplification des vêtements féminins, qui rend les ajustements superflus, on ne considère plus nécessaire la couturière professionnelle. Les chapeaux, façonnés à la machine et garnis simplement, ne requièrent plus de chapelière experte. Les manufactures de vêtements prolifèrent, tandis que plusieurs des anciennes couturières sur mesure y trouvent de l'emploi.

Le prêt-à-porter est moins cher que le sur mesure, une aubaine pour les consommatrices. Toutefois, cette nouvelle tendance ruine les couturières et les chapelières. En 1911, on comptait plus de 10 000 couturières et
5000 chapelières en Ontario. Dix ans plus tard, il n'en restait que la moitié. Vers le milieu du vingtième siècle, ces occupations sont presque désuètes. L'industrie du prêt-à-porter crée plusieurs nouveaux emplois pour les femmes dans les manufactures de vêtements, mais la grande confection à la main est éliminée.


Conclusion

Aujourd'hui, quand on choisit un vêtement dans un catalogue ou qu'on magasine du prêt-à-porter dans un grand magasin, on se souviendra que la plupart des composantes de l'habillement étaient taillés sur mesure lorsque le magasin Eaton a lancé son service de vente par correspondance en 1884. Comme tous les grands détaillants de l'époque, ce grand magasin gagne graduellement, mais sûrement, sa clientèle au prêt-à-porter. Les femmes, tout particulièrement dans les régions rurales, sautent sur l'occasion de s'épargner l'obligation de coudre leurs propres vêtements ou de payer une couturière. En 1924, Eaton leur promet un service rapide : « Envoyez votre commande et voici votre robe ! » Le magasinage par catalogue était devenu moderne.

 


Sources documentaires

BATES, Christina. « Creative Ability and Business Sense: The Millinery Trade in Ontario », dans Framing Our Past: Canadian Women's History in the Twentieth Century. Sharon Anne Cook, Lorna R. McLean et Kate O'Rourke (dir.) Montréal et Kingston, McGill - Queens, 2001.

GAMBER, Wendy. The Female Economy: The Millinery and Dressmaking Trades, 1860- 1930. Urbana, Ill., University of Illinois, 1997.

KIDWELL, Claudia et Margaret C. CHRISTMAN. Suiting Everyone: The Democratization of Clothing in America. Washington, Smithsonian Institution, 1974.

 

 

   
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