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Un passionné de la collection : Ronald Chabot
Texte de Marguerite Sauriol, établi à partir d'une entrevue réalisée par John Willis avec Ronald Chabot en novembre 2002.


« … l'aspect le plus important d'un collectionneur, ce n'est pas l'appât du gain…c'est le goût de l'aventure. » — Ronald Chabot

Ronald Chabot habite Lévis, sur la rive sud de Québec, où il est propriétaire d'une entreprise de pavage. Originaire de Saint-Zacharie, en Beauce, c'est un collectionneur passionné depuis plus de 35 années. C'est en effet en 1968, à l'âge de 21 ans, qu'il commence à amasser divers objets. L'élément déclencheur de cette pratique qui deviendra une passion : un jour, sur une route, Chabot croise un camion plein à « ras le bord  » d'antiquités. Il imagine que le véhicule se dirige vers les États-Unis, y emportant ces objets du patrimoine loin de leur lieu d'origine ou d'utilisation. Dès ce moment, il décide d'accumuler toutes sortes d'articles, qu'ils soient de fabrication canadienne ou étrangère, afin de les conserver ici, au Québec.

C'est donc après avoir réfléchi à la fuite vers l'étranger de ces objets anciens ou familiers qu'il s'est mis à collectionner les choses les plus variées. Depuis quelques années, toutefois, son intérêt s'est davantage tourné vers trois catégories d'articles  : d'abord, des objets en fonte (tirelires, poêlons, cuisinières, fers à repasser…); ensuite, les articles de promotion publicitaires et autres produits en tôle fabriqués par la Thomas Davidson Manufacturing enfin, les catalogues de vente par correspondance. Cette dernière catégorie, la plus imposante, occupe une place spéciale dans les collections de Chabot.

  La manufacture de la compagnie Thomas 
Davidson, Montréal, 1902.  
  

Agrandir l'image.Manufacture Thomas Davidson Limitée, rue Vinet, à Montréal. 1902.

  
     
  Assiette promotionnelle de Thomas 
Davidson.  
  

Agrandir l'image.Assiette publicitaire de la Thomas Davidson. Grâce à l'utilisation de certains procédés, entre autres la lithographie, la manufacture s'est démarquée par la beauté de ses produits, tels les boîtes de conserve et divers objets promotionnels.

  
     


Les catalogues de vente par correspondance

  L'ambition nationale d'Eaton, Eaton's 
Spring Summer 1950, page de couverture.  
  

Agrandir l'image.Page de couverture du catalogue d'Eaton, printemps-été 1950. En 1950, la compagnie étend son réseau de vente à l'ensemble du Canada. Comme en témoigne cette illustration, elle compte alors plusieurs édifices situés dans diverses parties du pays.

  
     

Cette décision de Chabot de collectionner les catalogues ne s'est pas prise du jour au lendemain. À ses débuts comme collectionneur, il en avait bien trouvé quelques-uns ici et là puis, au cours des dix ou quinze dernières années, il s'est mis à la recherche de catalogues de cuisinières et de poêles à bois québécois. C'est donc depuis le début des années 1990 qu'il collectionne ce type de publications « de façon systématique ». Lors d'une rencontre avec l'historien Michel Lessard, ce dernier lui explique non seulement le rôle que les collectionneurs jouent en approvisionnant les musées et les réseaux, mais aussi l'importance des catalogues qui constituent en eux-mêmes une source très riche en informations les plus diverses. Cette importance découle du fait que ce genre de publication, précise Chabot, est « un document… un témoin de son époque… un registre chronologique, en quelque sorte, qui présente le reflet de la société. Le catalogue ne ment pas ». Le collectionneur ajoute : « …quand on regarde un catalogue de détaillant, on peut rattacher un objet à une époque, puis on peut, à ce moment-là, regarder trois ou quatre catalogues avant, et trois ou quatre catalogues après » pour s'apercevoir que la mode a changé.


Le catalogue : un objet de collection de plus en plus convoité

Chabot a noté que le marché des catalogues avait évolué depuis une dizaine d'années. Par ses nombreuses visites aux antiquaires, à qui il a toujours expliqué ouvertement le but de sa recherche, Chabot a certainement contribué à faire comprendre à d'autres collectionneurs l'importance de ces ouvrages publicitaires. Beaucoup de gens ont commencé en effet à les rechercher pour diverses raisons, entre autres, parce que ces imprimés s'avèrent une façon sûre de dater les objets. Aussi, soutient Chabot, les catalogues de Noël s'avèrent-ils essentiels pour quiconque désire monter une collection de jouets. D'autres personnes, qui conservaient par hasard des catalogues, mais sans en faire une véritable collection, semblaient donc bien comprendre leur importance et, dans une certaine mesure, leur valeur.

Les catalogues suscitent donc à présent l'intérêt grandissant d'un bon nombre de gens, peu importe leur raison de les collectionner. Chaque catalogue présente des particularités, que ce soit sur le plan des catégories de marchandises offertes ou celui d'une présentation plus globale et plus diversifiée d'objets. C'est ce qui détermine, en partie, l'intérêt que porte Chabot à certains types de catalogues.


Éléments marquants de certains catalogues

  Trois statues du Sacré-Cour 
proposées 
par Daprato, 1929.  
  

Agrandir l'image.Trois statues du Sacré-Cour proposées par Daprato. 1929. L'entreprise de Chicago se spécialisait particulièrement dans la fabrication d'articles religieux. Extrait de son catalogue de 1929.

  
     

Si Chabot a une préférence marquée pour les catalogues consacrés aux poêles et son unique exemplaire illustrant les produits de la compagnie Thomas Davidson, les plus attrayants, du point de vue de leur présentation graphique, demeurent ceux de deux entreprises américaines, California Perfume, de New York, et Daprato, de Chicago, cette dernière spécialisée dans les articles d'art religieux qui ont connu une bonne diffusion à l'époque au Québec. Pour Chabot, celui de California Perfume est le plus impressionnant par l'emploi qu'on y fait des couleurs et par la façon d'y présenter, grandeur nature, les articles proposés.

De façon générale, ce sont surtout les catalogues des années 1910 et 1920 qui fascinent le Lévisien, en particulier, les sections consacrées à l'habillement et aux chapeaux de femme, dont il trouve merveilleuses les illustrations en couleurs. En effet, les catalogues visaient d'abord à attirer l'attention de la lectrice, de l'acheteuse. Les pages consacrées aux vêtements féminins y étaient, selon lui, plus nombreuses et beaucoup plus frappantes que les autres. Certains magasins ajoutaient la dimension du nationalisme et de la religion catholique à leur propos marchand : c'était le cas, par exemple, de Dupuis Frères.

 

  Produits de beauté pour adultes 
et 
enfants, catalogue California Perfume, vers 1917.  
  

Agrandir l'image.Produits de beauté inscrits au catalogue de la compagnie California Perfume. Vers 1917. Cette compagnie de New York confectionnait des parfums et des produits de soins hygiéniques pour les adultes et les enfants.

  
     

 

  Produits de beauté pour adultes 
et 
enfants, catalogue California Perfume, vers 1917.  
  

Agrandir l'image.Produits de beauté inscrits au catalogue de la compagnie California Perfume. Vers 1917. Cette compagnie de New York confectionnait des parfums et des produits de soins hygiéniques pour les adultes et les enfants.

  
     

 

  La cathédrale de 
Saint-Hyacinthe, 
Dupuis Frères (clergé) automne hiver 1939-1940, page de 
couverture.  
  

Agrandir l'image.Page de couverture du catalogue Dupuis Frères destinée au clergé. 1939. La page comprend une illustration de la cathédrale de Saint-Hyacinthe. Cette ville, située le long de la rivière Yamaska, dans un des districts les plus riches du Québec, comptait alors un grand nombre de communautés religieuses. L'illustration repose sur un fond constitué d'une feuille d'érable. Édition automne et hiver 1939-1940.

  
     

 

Pour Chabot, l'âge d'or des catalogues se situe entre 1880 et 1915, période que l'on surnomme en histoire « la belle époque  ». Il a observé que les catalogues de cette période comportent de fort belles gravures. Il remarque, par ailleurs, une détérioration dans la présentation matérielle de ce type d'imprimés à partir des années 1940, que lui-même qualifie de « période de décadence », alors que sévit la Deuxième Guerre mondiale. Dès lors, les illustrations insérées dans les catalogues prennent l'allure de photocopies pas très réussies et l'on n'y met plus autant l'accent sur la qualité même des produits. Évidemment, ce n'est pas le cas de toutes les compagnies. Par exemple, alors même que Chabot signalait à un collègue collectionneur la qualité du papier d'un catalogue d'une compagnie, ainsi que la richesse de ses images et de sa présentation graphique qui rendaient bien « la qualité de la fabrication de ce qu'ils produisaient », il se rendit compte qu'il n'avait pas remarqué que l'ouvrage en question provenait d'Angleterre.


Les collections de catalogues

La collection de Chabot compte en effet plusieurs catalogues produits par des compagnies étrangères, entre autres des États-Unis - ceux de Daprato et de California Perfume, déjà signalés - ainsi que celui de la Montgomery Ward, de Chicago. À ceux-là s'ajoutent quelques catalogues de poêles et de fabricants de voitures à chevaux et d'autres provenant de France.

  Goodwin's Fall Winter 1911-1912, page 
de couverture.  
  

Agrandir l'image.Page de couverture du catalogue de Goodwin's, automne-hiver 1911-1912. Située à Montréal, l'entreprise avait débuté ses activités deux ans auparavant sous la raison sociale Rea A.E. & Co.

  
     

C'est sans doute un catalogue d'Eaton ou de Simpson qui constitua l'un des premiers de la collection de Chabot. Celle-ci comprend maintenant plusieurs milliers d'exemplaires diffusés par de grands magasins et des détaillants spécialisés comme Canadian Tire, la Compagnie de la Baie d'Hudson, la Compagnie Paquet, P. T. Legaré, Goodwins, Bélanger, de Montmagny, Copp Brothers, de Hamilton, une entreprise spécialisée dans la vente de poêles, McClary, Gurnoy, Obe, de Montréal, qui faisait dans le vitrail, et Desjardins, une compagnie de fourrures. Chabot possède environ 140 catalogues de Dupuis Frères et de 400 à 500 des magasins Eaton et Simpson.

Chabot souligne que, à l'instar des catalogues de la Compagnie Paquet, ceux de P. T. Legaré sont difficiles à trouver, particulièrement les éditions du début du siècle. Il se compte chanceux, toutefois, d'avoir pu trouver des catalogues de cette entreprise. Un ami de la région de Saint-Roch-des-Aulnaies, dont le grand-père en avait été un représentant, en possédait toute une série dans son grenier. Un des catalogues datait de 1889, au tout début de l'entreprise, quand elle s'appelait Latimer et Legaré. Certains exemplaires étaient même restés dans leur enveloppe d'expédition, donc, pratiquement à l'état neuf. Chabot a hérité de cette série.

  Catalogue de traineaux de 
P. T. Legaré, page de couverture.  
  

Agrandir l'image.Page de couverture du catalogue de traîneaux de la P. T. Legaré. La compagnie fabriquait ses propres traîneaux.

  
     
  Brochure extraite d'un catalogue de 
moteurs de P. T. Legaré.  
  

Agrandir l'image.Dépliant extrait d'un catalogue de moteurs de P. T. Legaré. La compagnie se spécialisait dans les voitures et l'équipement agricole, en plus de distribuer des articles pour la maison.

  
     

À part ce genre d'heureux hasards, soutient Chabot, il faut fréquenter des lieux particuliers pour acquérir des catalogues.


Les trouvailles de Chabot

Les principaux endroits d'approvisionnement en catalogues sont les ventes-débarras et les marchés aux puces, à Saint-Romuald et à Sainte-Foy, par exemple. C'est d'ailleurs à ce dernier endroit que Chabot a découvert une boîte pleine de catalogues de Dupuis Frères : l'antiquaire, précise Chabot, lui avait alors « pratiquement donné la boîte ». Habituellement, on retrouve les catalogues à l'unité ou deux ou trois à la fois. Quant aux catalogues de Daprato de Chicago, Chabot s'en est procuré chez un antiquaire qui avait liquidé son commerce. Celui-ci avait conservé un lot de catalogues qui comptait plusieurs boîtes. Petit à petit, Chabot s'est fait connaître dans le réseau en tant que collectionneur, ce qui lui a parfois facilité l'acquisition de plusieurs objets. Il s'est ainsi retrouvé en possession d'une quantité considérable de catalogues et d'objets de collection. Il lui fallait donc penser à un endroit particulier où les conserver.


L'entreposage des catalogues

Les objets qu'accumule un collectionneur finissent par prendre une très grande place dans sa vie, car il s'agit d'une passion  : « Si vous parlez à un collectionneur, explique Chabot, il est nécessairement passionné… Une collection est comme la troisième personne d'un ménage. » Par conséquent, les objets ainsi accumulés en arrivent à envahir littéralement une maison. C'est ainsi que Chabot a dû effectuer un réaménagement complet de son sous-sol et d'une pièce de la maison dans le but de préserver ses trésors. Il a aussi employé des techniques spécifiques d'entreposage. Ainsi, les articles de fonte de Thomas Davidson sont rassemblés dans des boîtes de plastique hermétiques. Chaque catalogue, placé verticalement, a été inséré dans une enveloppe de plastique antiacide afin de le protéger de l'humidité, de la lumière et des rongeurs. En plus d'avoir procédé à l'inventaire des catalogues de Simpsons, de Dupuis Frères et d'Eaton, Chabot a établi un système de classement. Il a aussi une vaste collection de cartes postales, qu'il a placées par région dans des albums.


Fréquentation des collectionneurs

Depuis des années Chabot achetait systématiquement tout ce qu'il trouvait malgré le fait qu'il pouvait se retrouver avec deux ou trois exemplaires d'un même objet. Il a ainsi approvisionné des universités, des musées et des amis, et même prêté des catalogues à des chercheurs, entre autres, à un type spécialisé dans l'architecture traditionnelle au Québec et à un autre qui faisait de la recherche sur la culture matérielle du Québec. Il a aussi fourni des catalogues de Dupuis Frères, par exemple, au Musée canadien de la poste et à Josette Dupuis-Leman, une descendante de la famille des fondateurs de la compagnie Dupuis Frères, et dont certaines pages provenant de catalogues du magasin sont reproduites dans Dupuis Frères, le magasin du peuple, essai paru en 2001.

Depuis plusieurs années, vendeurs et collectionneurs d'antiquités ont l'occasion de se rencontrer dans le cadre d'un événement annuel important qui a lieu à Drummondville depuis quelques années et qui, en avril 2003, s'est tenu à Saint-Hyacinthe. Cet événement, qui ne constitue pas un lieu d'échanges de produits, s'ajoute aux rencontres informelles et aux réunions des membres de différentes associations de collectionneurs.


Conclusion

Il n'est pas facile de commencer une collection - « … il faut se faire aider, idéalement », dit Chabot - et ce n'est pas tous les collectionneurs qui sont prêts à partager leurs informations. Et, selon lui, le manque d'expérience auquel font face tous ceux qui entreprennent une collection est une autre difficulté dont ils doivent tenir compte. Il faut en effet compter plusieurs années d'expérience dans un domaine avant d'être en mesure de pouvoir déterminer avec justesse la qualité d'un objet. « Des fois, on se débarrasse de choses que l'on aurait dû garder ou on achète des choses que l'on n'aurait pas dû. » Pour ce qui est de sa collection de cartes postales, Chabot a mis environ cinq ans avant « de sentir le feeling », d'en arriver à jauger la nature d'une « une belle carte postale ». Il a commencé à collectionner celles qui illustraient les façades de magasins, leur intérieur, les artères commerciales, les commerces, les cartes postales publicitaires… bref une collection qui compte à présent de 1500 à 2000 spécimens.

 

  Carte postale promotionnelle de 
Lamontagne Limited.  
  

Agrandir l'image.Carte postale promotionnelle de la Lamontagne Limited. Cette compagnie montréalaise fabriquait des objets en cuir, tels de l'équipement pour les chevaux, des valises et des malles.

  
     

 

  Carte postale illustrant plusieurs 
établissements d'Eaton.  
  

Agrandir l'image.Carte postale illustrant divers édifices de l'entreprise Eaton. La carte montre aussi l'effigie du président de l'époque, J.C. Eaton. C'est en 1869 que Timothy Eaton ouvre son premier magasin à Toronto. Ce commerce est le précurseur du catalogue de vente par correspondance. Avant la fin des années 1920, Eaton compte un second magasin, à Winnipeg, deux manufactures et possède des bureaux en Europe.

  
     

 

  Carte postale promotionnelle du 
catalogue d'Eaton, 1945.  
  

Agrandir l'image.Carte postale promotionnelle d'un catalogue d'Eaton. 1945. Le client qui présentait cette carte au bureau de commande de la compagnie recevait en échange un exemplaire du nouveau catalogue automne-hiver 1945-1946.

  
     

 

En somme, être collectionneur, c'est être mu par une véritable passion, la « fébrilité de trouver un objet quelconque ». Après 35 ans passées à collectionner, lance Chabot, « on commence à avoir du métier, …on commence à connaître les objets, à connaître plein de choses » et c'est ce qui devient intéressant. Il ajoute qu'il y a un goût de l'aventure au départ. Cette passion de la collection a permis à Chabot de rencontrer de nombreuses personnes dans les musées, des historiens, tout en lui procurant l'occasion de voyager et de découvrir la province. Être collectionneur prend, pour ainsi dire, une dimension sociale.


 

 

 

   
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