Le 29 juin 1927, les Postes canadiennes émettent une série de cinq timbres pour marquer le 60e anniversaire de la Confédération. On désire souligner cet anniversaire avec faste étant donné qu’on s’était contenté d’émettre un seul timbre à l’occasion du 50e anniversaire, qui était tombé en pleine Grande Guerre, en 1917. Les timbres émis en 1927 représentent sir John A. Macdonald, premier ministre conservateur à l’époque de la Confédération (timbre de 1 ¢); les Pères de la confédération en réunion lors de la conférence de Québec en 1864, d’après un célèbre tableau de Robert Harris (timbre de 2 ¢); l’édifice du Parlement à Ottawa (timbre de 3 ¢); sir Wilfrid Laurier, premier ministre libéral de 1898 à 1911 (timbre de 5 ¢); et une carte du Canada montrant sa transformation depuis la Confédération (timbre de 12 ¢). Un timbre de 20 ¢ pour l’affranchissement du courrier par livraison spéciale est également émis à cette occasion avec les mêmes caractéristiques. Il présente tous les moyens de transport utilisés pour acheminer le courrier depuis la confédération en 1867. On y voit deux avions, un traîneau à chien, un cheval, un train à vapeur et un paquebot qui, selon M. Denis Masse, est le luxueux paquebot français Île-de-france. Ajoutons toutefois que les livraisons régulières par la poste aérienne canadienne ne commencèrent que quelques mois plus tard, soit le 9 septembre 1927. À la même date, on émet également trois timbres représentant Thomas D’Arcy McGee (5 ¢), sir Wilfrid Laurier et sir John A. Macdonald (12 ¢), ainsi que Robert Baldwin et sir Louis-Hippolyte LaFontaine (20 ¢). Cette émission avait originellement été prévue pour l’année précédente et n’a aucun rapport avec l’émission du 60e anniversaire de la Confédération, même si elle a lieu à la même date. Par ailleurs, à l’occasion du 60e anniversaire de la Confédération, on veut présenter les timbres dans les deux langues des peuples fondateurs : l’anglais et le français. L’émission de timbres bilingues, c’est une première dans l’histoire des Postes canadiennes. En fait, seuls les mots POST et POSTES sont dans les deux langues puisqu’il n’y a aucun accent sur le mot CONFEDERATION. On pourrait justifier cela en disant que l’usage d’alors prescrivait d’omettre les accents sur les majuscules, mais sur le timbre de 20 ¢ on constate que le mot EXPRÈS comporte un accent grave. Il est donc fautif de dire que cette série de timbres est complètement bilingue. Ce n’est toutefois pas la première fois que l’on retrouve du français sur les timbres canadiens. Dans l’émission du tricentenaire de Québec, en 1908, bien que les valeurs et les inscriptions officielles (CANADA POSTAGE) étaient en anglais seulement, les descriptions, elles, étaient en français seulement.

En 1928, une initiative mène à la production de la première série bilingue de timbres d’usage courant, soit la série « banderole » émise du 16 octobre 1928 au 6 janvier 1929. C’est dans cette série qu’on retrouve le célèbre de 50 ¢.

Cependant ces tentatives de bilinguisme se résument seulement par l’inscription des mots POSTES et POSTAGE alors que les autres inscriptions demeurent unilingues anglaises. En fait, il faut attendre le 1er juillet 1947 pour qu’une vignette postale canadienne porte les autres inscriptions dans les deux langues officielles.

Données techniques

Plusieurs ouvrages et auteurs indiquent que les timbres du 60e anniversaire de la Confédération ont été gravés par la Canadian Bank Note Company Limited, à Ottawa, sauf le timbre de 20 ¢ de Livraison spéciale qui a été gravé par l’American Bank Note Company, à New York. Il est à noter que la Canadian Bank Note Company, à Ottawa, n’a vu le jour qu’en 1935, lorsqu’elle a affiché cette nouvelle raison sociale pour remplacer l’American Bank Note Company, à Ottawa. Cela faisait tellement plus « canadien » aux yeux de la population. Cependant après maintes recherches, et surtout d’après les épreuves gravées qui ont été peu à peu mises au jour au fil des années, on sait maintenant que tous les timbres ont été produits par l’American Bank Note Company de New York, siège social de la Canadian Bank Note Company d’Ottawa.

Les poinçons sont acceptés le 20 avril (1 ¢ et 5 ¢), le 3 mai (2 ¢) et le 12 mai 1927 (3 ¢ et 12 ¢). Quant à la date d’acceptation du poinçon du 20 ¢, elle nous est toujours inconnue à ce jour.

Il nous manque également des indices pour pouvoir associer avec certitude tel graveur à telle émission, la majorité des épreuves connues n’étant pas signées. On s’entend généralement sur le nom d’Edward Gunn pour les 1 ¢ et les 2 ¢. De toute évidence, Harold Osborn travailla à l’émission du timbre de 3 ¢ puisqu’on retrouve son nom sur une épreuve. Quant aux autres valeurs de timbres, le travail pourrait avoir été fait par Elie Thimothy, E. T. Loizeaux ou William Ford. Comme on sait qu’à l’époque plusieurs graveurs travaillaient aux mêmes projets selon leur spécialité (notamment le dessin, les chiffres et les lettres), on comprendra qu’on ne pourra probablement jamais dire avec conviction qui a fait quoi.

Quant au nombre de timbres émis, là encore plusieurs auteurs avancent différents chiffres, mais nos recherches nous portent à croire que les quantités sont les suivantes :
   1 ¢ : 148 034 000 (6 plaques de 400 timbres)
   2 ¢ : 333 757 000 (15 plaques de 200 timbres)
   3 ¢ : 15 431 000 (3 plaques de 200 timbres)
   5 ¢ : 26 627 000 (3 plaques de 400 timbres)
   12 ¢ : 7 492 000 (2 plaques de 200 timbres)
   20 ¢ : 671 400 (1 plaque de 200 timbres)

Normand Caron