La première rencontre d'Itchiku Kubota avec la teinture Tsujigahana a eu lieu il y a environ cinquante ans, quand il était dans la vingtaine. Alors que Kubota travaillait avec des textiles de Yuzen peints à la main, il a remarqué un fragment d'un ancien vêtement de style Tsujigahana, dans la collection du Musée national de Tokyo.
«Un fragment de vêtement, vestige probable d'un costume datant de plusieurs siècles, déployait devant mes yeux éblouis un parterre de petites fleurs dessinées sur le nerinuki (soie tissée). Et si à travers les couleurs fanées il ne restait qu'une petite trace de sa splendeur d'autrefois, que je devinais dans la nuance des coloris, je la 'voyais' comme elle devait être quelques siècles auparavant.Ce petit morceau de tissu avait été préparé selon un procédé appelé «la teinture fantôme». M. Kubota a décidé sur-le-champ, qu'un jour il recréerait cette méthode de teinture.Mon cœur s'était mis à battre plus vite: j'étais ému, tremblant et fasciné devant tant de maîtrise et de raffinement dans la beauté. Pendant plus de trois heures je suis resté planté là, dans le hall désert du musée, à contempler ce petit bout de tissu qui semblait n'avoir été exposé que pour moi dans cette vitrine.
La rencontre avait été si intense, si chargée de mystère que plus tard j'ai pensé que, si la réincarnation existait, ce devait être moi l'auteur de cette teinture tsujigahana.»
- Itchiku Kubota
Le désir de créer de beaux motifs sur des vêtements kosodé (kimono à petites manches) a donné lieu à la technique de teinture Tsujigahana. Vers le milieu de la période Muromachi (1336-1573), des nuances et des broderies sont apparues et ont dominé les tendances de la mode japonaise, par exemple parmi les généraux et leurs femmes. À partir du XVe siècle, les préférences des gens en matière de vêtement ont commencé à aller vers les dessins multicolores plutôt que vers ceux à teinte uniforme.
La Tsujigahana est une méthode pour teindre des modèles picturaux, qui comportait originellement un nouer-lier-teindre. Le procédé Tsujigahana a poussé la technique de teinture tie-dye jusqu'à ses limites les plus extrêmes. Pour les parties qui ne pouvaient d'aucune façon être réalisées par la teinture tie-dye, d'autres techniques étaient adoptées librement, telles que lignes tracées en noir ou vermillion, nuances ajoutées, surimpression d'une feuille en or ou en argent, broderie, etc.
La finition quelque peu rudimentaire des premières pièces de Tsujigahana est à imputer à ces contraintes techniques. À l'apogée de la période Momoyama (1574-1614), cette méthode de teinture devient un artisanat extrêmement raffiné. Pourtant elle a décliné durant la première partie de la période Edo (1615-1867) et pour disparaître entièrement par la suite. De nos jours, des exemples de la Tsujigahana et de la documentation pertinente sont extrêmement rares et il n'existe pas de théorie bien établie à propos de l'étymologie de ce terme ni de celui de ses aspect techniques.
Il existe plusieurs méthodes pour la confection de l'Itchiku Tsujigahana et le choix de telle ou telle méthode dépend essentiellement du genre de kimono à créer. Voici quelques méthodes de base.