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La maison Alexandre Taché
172-174, rue Champlain

172-174, rue Champlain

Ce duplex, construit en 1911 par l'entrepreneur Joseph Bourque, possède les éléments des styles architecturaux beaux-arts et à l'italienne. Lorsqu'en 1918 Arthur Bourque, fils de Joseph, en hérite, il l'occupe déjà en entier. Dix ans plus tard, Bourque est acculé à la faillite et sa sœur Alexina rachète la maison des syndics. Elle la vend à Lucien Massé, comptable bien connu, qui y loge deux locataires.

Le 5 août 1942, Marie-Berthe Laflamme, femme d'Alexandre Taché, achète la maison dont elle transfère la propriété à son époux, le 14 décembre. Les Taché ne s'y installent pas immédiatement, car deux locataires, Ludovic Blain, notaire, et Albert Couture, bijoutier, occupent les lieux. En 1944, la famille Taché emménage au 174 tandis que Blain demeure au 172 jusque vers 1947. Après le départ de ce dernier, elle déménage au 172, laissant leur précédent logement à un neveu, Herbert Huard, fonctionnaire. Ayant besoin de plus d'espace, Taché fait percer une porte entre les deux chambres à coucher, à l'avant de la maison, et condamne, pendant plusieurs années, la porte qui donne accès au reste du 172. Madame Taché quitte la maison vers 1964. Sa locataire, Mme Flora A. Vaney, l'achète le 30 octobre 1967.

L'homme qui a marqué l'histoire de cette maison est né à Saint-Hyacinthe, le 17 août 1899. Alexandre Taché est le fils de Joseph de La Broquerie Taché (1858-1932), notaire et journaliste, arrivé à Ottawa en 1914 pour y remplir les fonctions d'imprimeur du Roi et de bibliothécaire du Parlement. Parmi ses grand-oncles et ses oncles se trouvent, entre autres, Étienne-Paschal Taché (1795-1865), premier ministre du Bas-Canada et Père de la Confédération, et Mgr Alexandre Taché, archevêque de Saint-Boniface, au Manitoba, de 1851 à 1894. Sa mère, Marie-Louise Langevin (1864-1936), est apparentée à Hector-Louis Langevin, autre Père de la Confédération.

Le 26 octobre 1925, à l'église Notre-Dame-de-Grâce, à Hull, Alexandre Taché, d'Ottawa, épouse Marie-Berthe Laflamme, fille mineure d'Édouard-Hector Laflamme, agent d'assurances, et de Delvina Berthiaume, de Hull. Le contrat de mariage stipule que « la future épouse aura l'entière administration de ses biens meubles et immeubles [...] Elle pourra, sur sa simple signature, sans le concours de son mari, recevoir le remboursement de toutes sommes à elle dues; faire tous transports... ». Jusqu'à récemment, rares étaient les femmes qui pouvaient conclure une transaction sans la signature de leur mari. Elle jouit donc d'une autonomie financière peu commune chez les femmes de son époque. Des sept enfants qu'aura le couple, cinq survivront à leurs parents : Alexandre, Yolande, Pierre, Suzanne et Lyse.

Taché étudie au Séminaire de Saint-Hyacinthe et à l'Université d'Ottawa et à l'Université de Montréal. Il devient avocat le 21 janvier 1924, puis est créé conseiller du roi en 1938. Il est bâtonnier du district de Hull de 1939 à 1944. L'Université d'Ottawa lui décerne un doctorat honoris causa en 1946.

Sa carrière politique débute en 1936 quand il est élu député de Hull à l'Assemblée législative, sous la bannière de l'Union nationale. Défait en 1939, il est réélu en 1944 et demeure député jusqu'en 1955. Il est celui qui occupa le poste de président de l'Assemblée le plus longtemps : du 7 février 1945 au 15 décembre 1955. Comme député, Taché s'intéresse particulièrement à la reconstruction et au développement des institutions régionales : les écoles, la prison de Hull, l'hôpital et l'orphelinat Sainte-Thérèse. Il encourage les troupes théâtrales et les associations littéraires de Hull, et les talents artistiques locaux, dont certains devinrent très connus : le peintre Jean Dallaire, le comédien Guy Provost, le pianiste Léon Bernier.

Il fut l'hôte du premier ministre du Québec, Maurice Duplessis, à la veille des élections de 1944, de 1948 et de 1952, lors de ses passages à Hull. Il arrivait avec son médecin et la famille lui laissait alors tout l'étage du haut.

En 1956, au terme de sa carrière politique, Taché est nommé juge à la Cour de magistrat, à Hull, puis promu en 1958 juge de la Cour supérieure des districts de Hull, de Labelle et de Pontiac. Il décède à Hull le 9 mars 1961, à l'âge de 61 ans. Cet homme très apprécié par son entourage était reconnu pour sa loyauté, sa ténacité, sa perspicacité, sa tolérance et son entregent. On se souvient que « [d]ans les différends ouvriers [...], il a toujours été du côté de l'ouvrier, soit comme arbitre soit comme avocat ».

Son fils aîné, Alexandre, entra chez les Oblats de Marie Immaculée, dont il fut le procureur à Rome. Quant à Pierre, né le 22 novembre 1928, il devient avocat en 1954 et juge à la Cour du Québec, le 6 septembre 1988. Décédé le 25 janvier 1996, à l'âge de 67 ans, il laissa l'image d'un homme plein d'humour, mais aussi de principes.



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