ans les années 1890, un grand nombre de travailleurs, parmi les plus qualifiés au Canada, cherchèrent à se prémunir contre les maigres salaires et la détérioration des conditions de travail en se joignant aux syndicats de métier. En fait, au cours des dix premières années du XXe siècle, les syndicats de métier menèrent des batailles ardues pour obtenir la reconnaissance syndicale et des augmentations salariales. Ces victoires, conjuguées à la menace croissante de voir la Seconde Révolution industrielle s'emparer du contrôle exercé jusque là par les corps de métier sur leurs lieux de travail, attirèrent des milliers de nouvelles recrues dans les rangs des syndicats. Les machinistes, les mouleurs, les briqueteurs, les charpentiers, les fabricants de chaudières, les ingénieurs, les conducteurs, les agents de train et les rembourreurs comptaient parmi les corps de métier syndiqués à cette époque.

Les succès ne furent pas remportés aisément par ces corps de métier; en fait, les syndicats essuyèrent autant de défaites qu'ils remportèrent de victoires. Les employeurs hostiles aux syndicats utilisèrent toutes sortes de tactiques pour ralentir la croissance du mouvement syndical. Ils intimidèrent les sympathisants du mouvement en les mettant à pied et en inscrivant leurs noms sur une liste noire. Certaines compagnies embauchèrent des agents de sécurité privés pour intimider les militants physiquement, en particulier durant les campagnes de mobilisation des travailleurs. Il n'était pas rare de voir les gouvernements aider les compagnies à s'en prendre aux travailleurs syndiqués. La police et parfois même l'armée arrêtaient les grévistes et détruisaient les lignes de piquetage. Le gouvernement appela même des troupes pour venir en aide aux entreprises en Colombie-Britannique, en Nouvelle-Écosse et au Québec. Les employeurs se tournèrent aussi vers le système judiciaire pour abattre davantage les syndicats. Nombre de tribunaux entérinèrent volontiers l'arrestation des grévistes, eurent recours à des injonctions pour prévenir le piquetage et engagèrent des poursuites judiciaires dans le but de paralyser financièrement les syndicats.



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