Mer et monde : Les pêches de la côte est du Canada

En quête du délice des jours maigres
Le voyage de pêche du Saint-André (1754)
En quête du délice des jours maigres : 
Le voyage de pêche du Saint-André (1754)

Par Jean-Pierre Chrestien à la TABLE DES MATIÈRES


En route vers La Rochelle
 

Vers 10 heures du matin, par " petit frais de vent " de Nord-Est, le Saint-André avançait lentement au milieu du canal à l'embouchure de la Seine. Jean Marin Le Roy attendait des vents favorables pour sortir du fleuve. Des vents contraires rendaient la progression laborieuse. Il n'avait pas le temps de ressasser ses mauvais souvenirs des campagnes de pêche précédentes. Il dirigeait les manœuvres qu'il noterait par la suite dans son journal de bord en indiquant l'orientation et la force des vents, le temps ou la distance parcourue. Au cours de la première partie du voyage qui allait conduire le Saint-André près des salines de l'Aunis et de la Saintonge, Le Roy dirigeait le navire selon les règles du cabotage ou de la navigation à vue. Il relevait la position de divers points, soit les îles et les caps reconnaissables à distance. Après plusieurs bordées, à 5 heures de l'après-midi, le navire parvenait à 4 lieues à peine, à l'E1/4NE du cap de la Hève, près du Havre-de-Grâce. Le Saint-André cingla 20 pendant toute la nuit.


Carte du golfe de Gascogne - 
Bibliothèque nationale du Canada

Figure 2 : Carte du golfe de Gascogne (détail)
Tirée de Pierre Bouguer, Nouveau traité de navigation contenant la théorie et la pratique du pilotage, 1753, planche VI, p. 160, Bibliothèque nationale du Canada.


À 8 heures du matin, le 24 janvier, par beau frais, Le Roy fit virer de bord vers le Sud. On rangea le grand foc, le perroquet de fougue et la voile d'étai à 10 heures. À midi on pris un ris de chaque hunier. Les marins replièrent une bande horizontale des voiles et l'attachèrent avec des garcettes 21 pour diminuer la surface de voilure présentée au vent. En fin d'après-midi, à 5 heures, on vira de bord, Sud et Nord, et au même moment Jean Marin releva le cap de la Hève au SE à 5 lieues seulement à l'arrière du navire. On continua à cingler.

Au cours de la nuit, jusqu'à 4 heures du matin, le vent frais et la pluie donnaient un avant-goût de la vie de marin aux plus jeunes. On vira de bord vers le Sud et mit toutes voiles dehors, NNO, par beau frais, la mer grosse. On cingla SO et OSO.

Mais laissons la plume à notre pilote.

Vendredi matin, à 5 heures, viré de bord sur l'ENE, le cap Lévy 22, au OSO, distant de 7 lieues. Puis jusqu'à 8 heures, par petit vent de NE1/4, nous avons cinglé à l'E1/4NE environ une lieue et demie.

Le Samedi de 3 à 6 heures, le vent ONO, petit frais, apporta un peu de neige et tourna au Nord par grand frais. On louvoya ainsi contre le vent d'Ouest jusqu'au dimanche 27 janvier toujours en vue du cap Lévy, à 5 lieues un tiers, par beau frais.

Dimanche, vers 4 heures du matin, Jean Marin observe et relève les récifs anglo-normands des Casquets 23 au SSO à environ 3 lieues.

Jusqu'à midi, les vents de NNE sont au beau frais et nous cinglons au O1/4NO, environ 5 lieues deux tiers. À 11 heures les Casquets sont derrière nous au SE à environ 5 lieues.

Du dimanche 27 au lundi 28 janvier 1754

Les vents varient de petit frais à grand frais et nous continuons à cingler vers l'OSO, franchissant en moyenne 4 lieues par quart de quatre heures.

Du lundi 28 au mardi 29 janvier 1754

Lundi, par beau frais, les vents de NE ont permis d'accélérer la vitesse à 5 lieues par quart. À 4 heures nous avons vu et relevé une première fois l'île d'Ouessant, au S1/4SE, à 4 lieues.

Au cours de la nuit, les vents variables d'ENE sont de grand frais; la mer grossit et l'écume des vagues déferlantes commence à être soufflée par le vent.

Du mardi 29 au mercredi 30 janvier 1754

À midi, le 29, toujours par vent de NE grand frais, Le Roy, ayant perdu de vue les côtes de la Bretagne, fait le point. Il observe la latitude de 47º28´ et continue à cingler SE, par petit frais, à 3 lieues par quart.

Du mercredi 30 au jeudi 31 janvier 1754

Le 30, par beau frais, vent NNE, nous cinglons vers l'ESE. À minuit nous avons sondé avec le plomb de 3 livres au Sud 1/4 SE de l'île d'Yeu 24. Nous avons trouvé 26 brasses d'eau et un fond de gros gravier roux clair et luisant. Les vents d'Est étant au beau frais, nous avons mis en travers jusqu'à 7 heures du matin, puis avons appareillé vers le SSE. Nous avons cinglé au SE jusqu'à midi puis viré de bord vers la terre et le Nord tribord amures 25.

Du jeudi 31 janvier au vendredi 1er février 1754

Jeudi, de midi à 5 heures, nous avons cinglé au NO environ 6 lieues. Puis à 5 heures, nous avons relevé le cap à l'Est de l'île d'Yeu à l'E1/4NE, à environ 3 lieues deux tiers. À ce moment, nous avons reviré de bord vers le NNE puis vers l'ESE ayant pour lors les vents au NE, beau frais.

Par grand frais, de 5 heures à 8 heures, nous avons cinglé à l'E¼SE environ 5 lieues. Puis par petit frais, vent d'ENE, de 8 heures à minuit nous avons continué vers le SE environ 3 lieues. De minuit à 4 heures, par vent de NE toujours petit frais, nous avons poursuivi notre route vers le Sud encore 3 lieues. À 4 heures nous avons sondé à 2 lieues au SE d'Olonne. Nous avons trouvé 12 brasses de fond de sable rouge taché de noir. Puis nous avons viré de bord sur le NO1/4NO. À 6 heures et demie, nous avons viré de l'autre bord et sommes entrés dans le Pertuis breton 26, entre 11 heures et demie et midi, après avoir côtoyé la terre depuis Olonne sur une distance de 2 ou 3 lieues 27.


Décoration

 

 
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