Le symbolisme des uniformes d’infirmière

Le 1er mai 2013

La petite coiffe blanche d’infirmière semble défier la gravité, perchée au sommet d’une impressionnante coiffure montée. Un accessoire peu pratique? Peut-être. Mais pendant un siècle, la coiffe fut l’emblème du professionnalisme des infirmières, surmontant un uniforme dont les aspects métaphoriques et matériels sont explorés par l’historienne Christina Bates dans son ouvrage intitulé Une histoire culturelle de l’uniforme infirmier.

Associée de recherche au Musée canadien des civilisations et conservatrice de l’exposition Une histoire de cœur – Des siècles de soins infirmiers au Canada, présentée en 2005, Christina Bates a étudié des milliers de photos et des centaines d’artefacts pour retracer l’évolution des uniformes d’infirmières – d’abord signe de respectabilité et d’éducation au sein de la classe moyenne, puis marque de professionnalisme scientifique, et enfin symbole dépassé de discipline hiérarchique.

« Même si j’ai pu douter que l’uniforme ait si bien servi les jeunes femmes en termes de professionnalisme, je dois dire qu’en général celles qui le portaient en étaient extrêmement fières », précise Christina Bates.

Cherchant à améliorer les standards et à se dissocier de leur réputation d’hospices pour les pauvres, les hôpitaux ont institué des programmes de formation en sciences infirmière à la fin du XIXe siècle. Ils ont imposé un uniforme respectable à leurs jeunes recrues de la classe moyenne, les différenciant des infirmières plus âgées de la classe ouvrière, non formées, souvent pastichées en personnes débraillées en état d’ivresse.

Au début du XXe siècle, l’uniforme standard de l’infirmière se composait d’une robe conservatrice, d’un tablier à bavette blanc empesé, de manchettes et d’un collet amovibles ainsi que d’une coiffe blanche empesée. Signe honorifique, la coiffe n’était décernée qu’aux infirmières-étudiantes ayant réussi une période de probation exténuante.

Les vêtements de dessus blancs symbolisaient l’hygiène et le professionnalisme scientifique tout en servant à désexualiser le contact corporel intime entre les infirmières et les patients masculins, explique Christina Bates. « La bavette était tellement empesée qu’elle tenait à distance du corps et couvrait entièrement la poitrine. »

Dans les années 1970, quand la formation en nursing ne fut plus l’apanage des hôpitaux mais des universités, et que la pensée individuelle prit préséance sur la discipline hiérarchique rigide, les infirmières se rebellèrent contre l’uniforme devenu un symbole de soumission.

 L’unique vestige de l’uniforme traditionnel réside maintenant dans la coiffe blanche empesée que certaines infirmières arborent encore avec fierté sur leur photo de graduation.

Une histoire culturelle de l’uniforme infirmier est publié par le Musée canadien des civilisations et est disponible en ligne.

Kingston General Hospital Archive

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