L'espace de l'alphabet - II
L'espace de l'alphabet – II, 1999-2001
Installation vidéo: deux vidéos (Topsy Turvy Land, 1999;
Les langues du monde, 2000), étagère en bois, carreaux de
céramique vernissés, objets divers
Prêt de l'artiste
(Photo : Harry Foster  © Société du Musée canadien des civilisations)

Note : L'étagère a été construite par Ron Benner sur le modèle des étagères de la section des collections spéciales de la Bibliothèque D. B. Weldon de la University of Western Ontario, London, Canada



«Version d'une installation antérieure de plus grandes dimensions, L'espace de l'alphabet II présente différents artefacts à l'intérieur d'une reproduction de bibliothèque ancienne prévue pour abriter des livres rares. L'installation comprend deux vidéos montrant deux enfants filmés sur une période de deux ans. Dans Topsy Turvy, les enfants explorent leur rapport à la géographie, à l'histoire et à la langue du monde arabe et parlent de l'apprentissage de la langue arabe tout en se déplaçant dans un environnement familier. Dans Les Langues du monde, l'action se passe dans une salle de bibliothèque et une troisième personne lit un texte en français sur la langue arabe.

Entrecroisant des fragments d'anglais, de français et d'arabe, L'espace de l'alphabet II invite le spectateur à s'interroger sur les définitions de l'identité en tant qu'elles se rapportent exclusivement au domaine du langage.»


Extrait du commentaire de l'artiste




Jamelie Hassan est née en 1948 à London, en Ontario. Pour fuir la conscription dans l'armée turque et la Première Guerre mondiale, son père et son grand-père maternel avaient, au début du 20e siècle, quitté les montagnes du Liban et émigré en Amérique du Nord. C'est à Rome (1967) et à Beyrouth (1968) qu'elle entreprend des études en arts visuels qu'elle poursuivra une fois rentrée à London (1969) tout en travaillant à la bibliothèque de l'University of Western Ontario. Elle ouvre son premier atelier et devient active dans le milieu culturel. En 1978, elle se rend en Irak pour étudier l'arabe à l'université de Mustansyria. Ses nombreux voyages ne cessent d'enrichir son travail, où transparaît souvent son profond respect pour les arts populaires, traditionnels et indigènes.

Maison de Jamelie Hassan
Maison de Jamelie Hassan, London, Ontario, 2000
Rawi Hage
Épreuves argentiques
Collection du Musée canadien des civilisations

Dans ses installations, Jamelie met en dialogue les références culturelles passées et présentes avec des éléments de sa propre histoire. Elle combine des images et des sons (aquarelles, peintures murales et photographies, bandes vidéo et audio), des objets (réels ou reproduits, souvent en céramique) et des textes. «Une des qualités thématiques du travail de Hassan, écrivait dernièrement la critique d'art montréalaise Monika Kin Gagnon, c'est son respect et son intérêt pour les petites histoires de tous les jours, celles qui contredisent délibérément le discours de l'Histoire avec un grand H. On retient de ses premières installations la tension qu'elle fait surgir entre les aspects de la vie quotidienne et la façon dont l'histoire officielle les éclipse ou les gomme.»

Consciente du caractère construit de l'orientalisme et activiste culturelle, elle a trouvé dans les analyses d'Edward W. Said et de Gayatri Chakravorty Spivak un discours critique qui rejoint ses préoccupations sur la représentation et la subjectivité. D'où l'importance qu'elle accorde à certains aspects du langage, de la narration ainsi qu'aux diverses formes de « translations » culturelles. Elle fait partie de ces artistes qui cherchent à déstabiliser la dichotomie production/diffusion en plaçant leurs œuvres in situ et en contexte, ébranlant de ce fait la conception que nous nous faisons de l'art en tant qu'objet.

Lauréate en 2001 du Prix du Gouverneur général, Jamelie Hassan a participé à de nombreuses expositions au Canada et à l'étranger. Ses œuvres figurent dans de nombreuses collections publiques, comme le Musée des beaux-arts du Canada, la Banque du Conseil des arts, le Musée des beaux-arts de l'Ontario et le Nouveau Musée d'art contemporain de New York.