n plein cœur de la Crise, un mouvement social prit naissance aux États-Unis qui, en quelques années seulement, modifia considérablement les relations de travail en Amérique du Nord. Il vit le jour au congrès de 1935 de l'American Federation of Labour (AFL). J.L. Lewis, le respecté président de l'organisation militante United Miner Workers' of America, mit au défi l'AFL d'ouvrir sa porte aux syndicats industriels. Avant la fin du congrès, Lewis avait recueilli suffisamment d'appuis pour forcer les dirigeants réticents de l'AFL à créer le comité de mobilisation industrielle (Committee for Industrial Organizing ou CIO). Le comité avait pour mandat de répandre l'esprit du syndicalisme industriel.

Les militants du CIO, répartis en divers endroits des États-Unis, commencèrent à prêcher la philosophie du syndicalisme industriel à un public enthousiaste de travailleuses et de travailleurs américains. Les campagnes de mobilisation ne tardèrent pas à pénétrer au cœur des usines de production de masse de l'industrie américaine de l'automobile, de l'acier, du caoutchouc, de l'emballage de la viande et des pièces électriques. La frustration des travailleuses et des travailleurs face à leur situation éclata au grand jour sous forme de militantisme duquel surgit une quantité massive de lignes de piquetage et d'occupations d'usines. Il n'en fallut pas plus pour que les travailleuses et les travailleurs du CIO célèbrent des victoires qu'il aurait été impossible d'imaginer à peine quelques années plus tôt. Le succès du CIO sur les lieux de travail produisit aussi des changements sur la scène politique. La New Deal legislation et la Wagner Act, nées en partie de la pression du salariat, renforcèrent les droits juridiques des syndicats aux États-Unis. Cependant, comme nous le verrons, cette victoire ne fut pas sans frais pour la classe ouvrière.

LA CRÉATION DU CIO AU CANADA

Au Canada, les sympathisants du mouvement syndical surveillaient les événements au sud de la frontière avec de plus en plus d'intérêt. En 1937, les Canadiens demandèrent de l'aide au CIO. Déjà submergés par les événements aux États-Unis, les dirigeants du CIO avaient peu de ressources à partager avec les organisateurs canadiens. Ils leur offrirent un soutien moral, une petite somme d'argent et l'aide d'un organisateur. Il était évident que le succès du CIO au Canada dépendrait des militants syndicaux canadiens. L'intérêt pour le CIO se répandit rapidement. Les bûcherons en Colombie-Britannique, les travailleuses de l'industrie du vêtement à Montréal et les métallurgistes de Sydney furent parmi les premiers à signer leur carte de membre du CIO. Mais ce furent les industries de production de masse du Sud de l'Ontario qui furent au cœur du mouvement. C'est là où les chefs de file, en majorité communistes, des premières années du CIO furent mis au défi de prouver leur talent mobilisateur.



Lien à la Galerie du progrès social