Des ossements virtuels en 3D grâce à un projet bien réel

Le 6 janvier 2014

En 2006, Matthew Betts a rapporté six palettes d’ossements après des fouilles archéologiques effectuées sur les îles Aléoutiennes… sans toutefois être certain de pouvoir les identifier. Le zooarchéologue était convaincu que les ossements pouvaient livrer des indices sur le mode de vie des chasseurs-cueilleurs qui avaient vécu sur ces îles de l’Arctique il y a 7 000 ans, en particulier les espèces de poissons qu’ils pêchaient, les animaux qu’ils chassaient, la façon dont ils aménageaient leur environnement et l’influence du milieu sur leurs habitudes de vie. Le seul moyen d’identifier les ossements découverts était de les comparer avec d’autres échantillons connus. Cependant, l’Idaho State University, où travaillait Betts à ce moment-là, ne possédait pas de collections de référence adéquates.

« Certains de nos chercheurs sont allés examiner les collections de référence d’autres musées. Nous avons affiché des photos des ossements sur des babillards spécialisés en demandant de l’aide pour leur identification. Nous avons aussi emprunté des collections, ce qui était plutôt risqué parce que ce sont des artefacts irremplaçables. En plus d’entraîner d’énormes frais, ces initiatives ont abouti à des analyses très peu précises », explique Matthew Betts.

Le chercheur et ses collaborateurs de l’Idaho State University, Herbert Maschner et Corey Schou, ont eu l’idée de créer des images tridimensionnelles des ossements de vertébrés de l’Arctique en vue de les soumettre aux chercheurs du monde entier en les affichant sur un site Web public. Ainsi était lancé le Virtual Zooarchaeology of the Arctic Project (VZAP).

« Il s’agit d’un outil mis à la disposition des zooarchéologues et d’autres archéologues pour les aider à affiner leurs analyses et à les rendre plus précises et plus efficaces », d’expliquer Matthew Betts, qui est maintenant conservateur, Archéologie des provinces de l’Atlantique, au Musée canadien de l’histoire. « Des centaines de personnes consultent le site Web. Il est utilisé dans le monde entier. »

Achevé récemment, le VZAP comprend des images 2D et 3D d’ossements d’environ 200 animaux. L’Idaho Virtualization Laboratory de l’Idaho State University crée ces images en utilisant simultanément le balayage laser et la photographie haute définition. De véritables ossements faisant déjà partie de collections connues sont balayés afin de produire des formes 3D. Ces dernières sont ensuite « enveloppées » dans les images photographiques en vue de créer une représentation réaliste de la surface des ossements.

Le VZAP est le premier projet du genre en archéologie. Sa technologie pourrait facilement être appliquée à d’autres collections d’artefacts ou de spécimens de plantes et d’animaux.

« En fin de compte, nous offrons un accès virtuel aux collections des musées, souligne Matthew Betts. Le projet donne une idée de ce que peut être une collection virtuelle. »

 Image en vedette : Crâne de boeuf musqué (Ovibos moschatus) du Burke Museum of Natural History and Culture (Seattle).

Image 3D d'un crâne de grand pingouin


Crâne de grand pingouin (Pinguinus impennis) provenant des collections de la Smithsonian Institution (Washington).