Odeur de sainteté

Où serez-vous, le 17 octobre? Certains fervents ont déjà réservé leurs billets pour la grande traversée, direction place Saint-Pierre, à Rome. Ce jour-là, le pape Benoît XVI accrochera l’étoile du frère André au firmament des Saints. Vous ne pouvez être du voyage? Qu’à cela ne tienne : venez rendre hommage au petit frère des pauvres en visitant le module qui lui est consacré dans l’exposition Tête-à-tête du Musée canadien des civilisations.

Le dernier sera le premier

Plus de 70 ans après sa mort, Alfred Bessette, mieux connu sous le nom de frère André, passera définitivement de sa condition de petit portier à celle de Saint. Ce fils de famille pauvre, orphelin sans éducation, deviendra ainsi le premier saint né en sol canadien. Si Marguerite d’Youville l’a devancé de quelques années, aucun homme de chez nous n’avait encore traversé le long parcours menant à la canonisation. Car ne devient pas saint qui veut.

Avant de mériter ce titre enviable, le frère André a dû franchir les trois étapes prescrites par l’Église. D’abord, une enquête diocésaine pour déterminer s’il avait mené une vie vertueuse et héroïque : un résultat positif lui a valu, en 1978, le titre de vénérable. Suivait l’étude, par un comité de médecins et de théologiens, d’une ou deux guérisons attribuées au petit frère, depuis sa mort : ces guérisons jugées miraculeuses, il est devenu bienheureux en 1982.

Enfin, pour franchir l’étape ultime, il devait accomplir un dernier miracle après sa béatification. Deux commissions, l’une médicale, l’autre théologique, attribuèrent à son intercession la guérison d’un jeune garçon frappé par une voiture. Le diagnostic était unanime : « coma post-traumatique; stade terminal ». On attendait la fin… qui n’est pas venue. Non seulement le jeune garçon est-il sorti de son coma, mais il n’a gardé aucune séquelle et, maintenant adulte, se porte à merveille.

Mais est-ce en raison de ces miracles que le frère André est au Musée?

Tête-à-tête avec le frère André

À sa mort en 1937, pas moins d’un million de personnes, venues de tout l’est du Canada et des États-Unis, ont défilé devant le cercueil du frère André. C’est dire la renommée qui entourait l’humble portier. Toute sa vie, il avait mis son charisme, sa générosité et sa foi au service des démunis. Bien que son écoute, ses bonnes paroles et ses fioles d’huile bénite étaient un baume sur la misère des plus pauvres, il se défendait bien du don de guérisseur qu’on lui attribuait.

Car entre son travail et ses nombreuses visites, le frère André poursuivait un tout autre rêve : ériger, sur la montagne qui faisait face au Collège, la plus grande église en l’honneur de saint Joseph. D’une petite chapelle dans les bois au monument que l’on connaît aujourd’hui, la ferveur de ceux qui croyaient en frère André aura fait des miracles. Lui-même ne verra jamais l’Oratoire complété, mais il en reste l’âme et le premier bâtisseur.

C’est donc sous le thème « Nous avons fondé » de l’exposition Tête-à-tête, que le frère André a fait son entrée au sein des 27 personnalités connues et méconnues qui ont contribué à façonner le Canada. Le majestueux Oratoire Saint-Joseph est d’ailleurs la pièce centrale autour de laquelle gravite le module de l’exposition. Au hasard d’une lecture Xavier Gélinas, conservateur en histoire politique canadienne, a découvert le projet fou d’un certain Jean-Paul Bélair. Ferblantier et ancien étudiant du Collège Notre-Dame, celui-ci s’était donné pour mission de construire une maquette en fer du célèbre Oratoire : huit mois de travail à temps plein ! Le conservateur tenait là la pièce maîtresse pour illustrer le rôle de fondateur qu’a joué le frère André. Ex-voto, huile bénite, photos et témoignages viennent compléter cet hommage au frère André.

Deux millions de personnes visitent chaque année l’Oratoire Saint-Joseph. On peut imaginer qu’ils seront nombreux, dans les prochaines semaines, à venir saluer sa canonisation. Si vous n’aimez pas les foules et voulez renouer avec l’histoire de notre premier saint, Tête-à-tête vous attend.