Un mystérieux timbre

Jennifer Millar

Il y a quelques années, le Musée canadien de l’histoire a acquis un essai philatélique qui constitue autant un trésor national… qu’un grand mystère.

« Quand l’essai est devenu accessible, j’étais ravie parce que je savais que ce serait un précieux ajout à la Collection de timbres du Canada », explique Bianca Gendreau, gestionnaire, le Canada contemporain et le monde, au Musée. « Maintenant, tous les Canadiens pourront voir un essai de timbre qui est peut-être associé au gouvernement provisoire de Louis Riel au Manitoba. Il s’agit de l’un des plus grands mystères de la philatélie canadienne. »

On connaît l’existence de 10 exemplaires du motif. Le premier a fait surface en 1929 et a suscité l’intérêt soutenu des philatélistes. Trois font partie de la collection philatélique royale, au Royaume-Uni. Depuis la découverte des exemplaires de l’essai, le débat entourant la date de leur création et l’histoire de leur production se poursuit.

Essai philatélique qui pourrait avoir été commandé par Louis Riel. Musée canadien de l’histoire, IMG2015-0100-0039-Dm

Essai philatélique qui pourrait avoir été commandé par Louis Riel. Musée canadien de l’histoire, IMG2015-0100-0039-Dm

« Après cette trouvaille, les chercheurs ont commencé à se pencher sur l’attribution de l’essai à Riel, personnalité emblématique de l’histoire canadienne », d’ajouter Bianca Gendreau.

Après avoir formé un gouvernement provisoire lors de la Rébellion de la rivière Rouge, en 1869-1870, Louis Riel a nommé un maître de poste, Andrew Graham Ballenden Bannatyne, qui était un homme d’affaires bien connu. Certains sont d’avis que cette nomination témoigne à la fois de la confiance de Riel et la signification qu’un système postal aurait représenté pour un nouveau pays. La production d’un timbre s’inscrivait comme une étape dans le processus normal.

Selon une autre théorie, l’essai aurait plutôt été produit lors de la Rébellion du Nord-Ouest en 1885, qui a mené à la condamnation de Riel pour trahison. Bien que la femme représentée sur l’essai ne soit pas Marianne, symbole de la France républicaine, elle porte un type de bonnet qui évoque la liberté et la Révolution française.

Il existe une autre hypothèse qui n’est toutefois pas liée à Riel : l’auteur des essais aurait été un marchand de timbres, soit O. Kendall, de Winnipeg, ou Samuel Allan Taylor. Toutefois, un tel motif n’a jamais figuré dans les catalogues de l’époque.

« Cet essai raconte une histoire qui va bien au-delà du motif d’un timbre, de conclure Bianca Gendreau. Il s’agit d’un important exemple d’alliance entre une rareté philatélique et un épisode crucial de l’histoire du Canada. Ce petit morceau de papier soulève des questions au sujet du symbolisme de Louis Riel et du rôle historique susceptible d’être attribué à un timbre. »