Une énigme philatélique

Le 30 janvier 2015

Grâce à la curiosité d’un philatéliste belge, le Musée canadien de l’histoire a fait l’acquisition d’une pièce rare : une plaque en cuivre ayant servi à imprimer de faux timbres-poste de un shilling du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse datant de 1851.

Le philatéliste n’était pas un collectionneur de timbres canadiens et ne savait pas que la plaque, trouvée dans un marché aux puces en Belgique, avait servi à imprimer de fausses vignettes. Il l’a achetée en supposant qu’elle avait un intérêt historique. Après avoir communiqué avec plusieurs musées européens, il s’est adressé au Musée canadien de l’histoire, à qui il a fait don de la plaque d’impression en 2013.

Au Musée, l’expert qui a examiné la plaque s’est immédiatement étonné de sa grande qualité. « C’est l’œuvre d’un maître », confirme Bianca Gendreau, gestionnaire, le Canada contemporain et le monde. « Les gravures sont des œuvres d’art miniatures. La plaque comporte une multitude d’infimes détails, au point qu’il faut une loupe pour être en mesure de distinguer les timbres authentiques des faux. »

Cette plaque revêtait un grand intérêt pour le Musée, car personne n’en connaissait l’existence, même si les timbres contrefaits en question étaient déjà bien connus : les premiers avaient été découverts en 1897. « La contrefaçon de timbres existe depuis des siècles, mais on retrouve rarement les plaques d’impression puisqu’elles constituent des preuves d’activité criminelle », explique Mme Gendreau.

La contrefaçon des premières émissions

Les timbres du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse qui ont été contrefaits au moyen de la plaque retrouvée étaient les premières vignettes émises par les deux provinces. En 1851, le gouvernement impérial britannique avait transféré la responsabilité de l’administration postale à la Province du Canada (actuellement le sud de l’Ontario et le sud du Québec), à la Nouvelle-Écosse, au Nouveau-Brunswick, à l’Île-du-Prince-Édouard et à Terre-Neuve. « Il est important que cette plaque d’impression soit retirée de la circulation, car les timbres de 1851 ont beaucoup de valeur. De plus, il n’est pas souhaitable de voir arriver des timbres contrefaits d’une très grande qualité sur le marché », d’ajouter Mme Gendreau.

Comme il n’était jamais arrivé que les faux timbres du Nouveau-Brunswick et ceux de la Nouvelle-Écosse se retrouvent côte à côte, personne ne savait qu’ils provenaient d’une seule et même plaque d’impression — jusqu’à ce que celle-ci soit découverte sur un marché aux puces en Belgique un siècle plus tard. En excellent état, la plaque mesure 20 cm de long sur 15 cm de large. Elle est en cuivre et non en acier comme la plupart de celles qui sont utilisées aujourd’hui. « La production à grande échelle nécessite de lourdes plaques en acier. Plus légères, celles qui sont en cuivre sont faciles à transporter et c’est un atout pour un faussaire. »

Déjouer les techniques des faussaires

Aujourd’hui, en dépit des nouvelles techniques d’impression basées sur la haute technologie, la contrefaçon de timbres au Canada et dans le monde continue de sévir. Pour compliquer la tâche des faussaires, Postes Canada a incorporé des composantes graphiques et des éléments de sécurité dans ses timbres.

Par exemple, à l’instar des tout premiers timbres, la vignette Ours brun d’une valeur nominale de 8 $ émise en 1997 a été réalisée au moyen de la gravure sur acier. Cette technique rend difficile la reproduction de la texture et de la finesse des détails. Les autres éléments de sécurité sont moins évidents. Une loupe permet de constater que l’herbe et le ciel sont composés d’une multitude de petites images d’ours. De plus, un petit chiffre 8 est imprimé sur la patte arrière droite de l’animal, et la date de l’émission est inscrite en petits caractères sous sa patte avant gauche.

« Si vous examinez de près les récentes émissions, vous remarquerez la présence d’éléments de sécurité dans le motif, le papier ou les couleurs utilisées pour leur production, indique Bianca Gendreau. C’est dire que la sécurité continue d’être une préoccupation de premier plan. »

Image : Plaque en cuivre ayant servi à imprimer de faux timbres-poste de un shilling du Nouveau-Brunswick et de la Nouvelle-Écosse datant de 1851.
© Musée canadien de l’histoire