Vêtements de travail

Les agriculteurs et la classe ouvrière à l’époque de la Confédération (1840-1890)

« J’ai besoin de leur aide pour vivre. »

Prononcés par une femme dont les filles venaient d’être congédiées d’une filature de coton, ces mots reflétaient la réalité de la plupart des ménages agricoles et de la classe ouvrière à l’époque de la Confédération. Pour ces familles, le travail rémunéré et non rémunéré des épouses et des enfants était indispensable parce que, contrairement aux familles de la classe moyenne, le revenu d’un soutien de famille masculin ne leur permettait pas de joindre les deux bouts.

Les familles d’agriculteurs

La plupart des agriculteurs laborieux possédaient une ferme d’environ 40,5 hectares (100 acres) quand ils atteignaient l’âge moyen. Aidés de leurs fils, qui commençaient à travailler à leurs côtés dès l’âge d’environ quatorze ans, ils abattaient une série de tâches saisonnières exigeantes : préparation du sol et semailles au printemps, suivies de la coupe du foin puis des récoltes en été et en automne.

Le soin des animaux devait se faire toute l’année, tandis que des tâches comme le défrichage, le creusement de fossés de drainage, l’installation de clôtures et la coupe de bois de chauffage étaient effectuées quand le temps le permettait. En hiver, certains agriculteurs et leurs fils gagnaient de l’argent en travaillant dans des camps de bûcherons, où ils coupaient du bois et le préparaient pour le flottage vers les scieries au printemps.

La femme et les filles des agriculteurs assuraient le fonctionnement ordonné et économique du ménage. Elles s’occupaient des jeunes enfants, préparaient les repas, lavaient et reprisaient les vêtements, et cultivaient le potager familial. Elles contribuaient à l’économie familiale en préparant des conserves pour l’hiver, en fabriquant du savon et des bougies avec la graisse des animaux abattus, en trayant les vaches, en fabriquant du beurre et en filant la laine, qu’elles tissaient ou tricotaient pour confectionner des vêtements et des étoffes. Elles contribuaient aussi au revenu familial en vendant du beurre, des œufs, de la laine et d’autres produits pour gagner de l’argent supplémentaire.

Les familles de la classe ouvrière

À l’époque de la Confédération, les travailleurs non qualifiés à la recherche d’un emploi saisonnier de manœuvre dans le domaine du camionnage, de la construction ou des travaux publics devaient avoir un dos solide. De même, des doigts agiles permettaient aux femmes et aux enfants d’occuper un emploi peu rémunéré dans les usines de vêtements, de chaussures et de tabac.

Les hommes qui avaient la possibilité d’apprendre un métier étaient favorisés, mais vulnérables aux diminutions de salaire et au chômage. À partir des années 1860, les travailleurs qualifiés se sont regroupés en nombre croissant pour former des syndicats et des centrales syndicales qui luttaient pour améliorer les salaires et les conditions de travail de leurs membres.

Comme le travail rémunéré du chef de famille masculin était souvent insuffisant, les familles des ouvriers comptaient sur plusieurs moyens pour joindre les deux bouts. Dans les villes, les familles qui avaient la chance d’avoir une cour cultivaient un jardin potager et pouvaient garder une vache, un cochon ou quelques poules. Les femmes pouvaient gagner de l’argent chez elles en lavant du linge, en logeant un ou deux pensionnaires ou en faisant de la couture. Parmi les femmes qui travaillaient à l’extérieur du foyer, si quelques-unes trouvaient un emploi dans une usine, celles qui travaillaient comme domestiques dans des foyers de la classe moyenne étaient beaucoup plus nombreuses. Elles représentaient environ le tiers des travailleuses en 1871. Les enfants gagnaient de l’argent de poche en faisant des courses, en cirant des chaussures ou en vendant des journaux, des fruits, des crayons et d’autres menus articles.

Un équilibre précaire

Pour les familles d’agriculteurs et de la classe moyenne, des calamités comme de mauvaises récoltes, le chômage, la maladie, des blessures ou un décès pouvaient gravement perturber l’équilibre délicat de l’économie familiale. Si la crise était de courte durée, les familles pouvaient puiser dans leurs maigres économies ou recourir à l’aide de membres de leur famille élargie.

Dans des situations plus sérieuses et prolongées, les familles se trouvaient aux prises avec de graves difficultés et risquaient de se fragmenter. Une mère nouvellement veuve, incapable de nourrir ses enfants et de payer le loyer, pouvait confier ses enfants à des parents ou à un orphelinat jusqu’à ce qu’elle se remette à flot. Les hommes qui fréquentaient les tavernes dépensaient le précieux revenu familial et rentraient souvent avec une attitude abusive. Les mouvements pour la réforme sociale et contre l’alcool de la fin du XIXe siècle sont nés du désir d’atténuer les pires de ces circonstances.