Mi'kmaq
Les Mi'kmaq qui ont épousé des Étoiles

              E'e, au matin, lorsque les hommes sont sortis chasser, ces deux femmes s'enfoncent plus profondément dans la forêt et laissent le campement derrière elles.
              Elles sont joyeuses, ces deux femmes. Ce sont des Skusi'skwaq, des Femmes Belettes, et elles ont la peau très blanche, comme la fourrure de toute Personne Belette l'hiver. Et ces deux Skusi'skwaq sont sœurs. Sœur aînée a du Pouvoir. Elle s'enfonce avec l'autre loin dans la forêt, et elle y construit un abri. Sœur cadette fait un petit feu.
              Il fait maintenant nuit. Le soleil est parti sous la terre, et ces deux sœurs, ces deux Belettes, sont couchées et regardent les étoiles. Sœur aînée dit à Sœur cadette : «Ce sont des Personnes dans le Monde céleste. Regarde leurs yeux, qui luisent là-haut.»
              Sœur cadette demande :«Quelle Étoile voudrais-tu comme mari, étendue à ton côté au matin? Une aux grands yeux, ou une aux petits yeux?»
              Sœur aînée répond : «Je choisis celle-là, là-bas, la plus brillante, la plus radieuse.»
              Sœur cadette rétorque : «Oh, celle-là. Celle-là est laide.
              Bon, fait Sœur aînée. Laquelle choisirais-tu, toi?
              Cette petite étoile, là, la petite rouge.»
              Et ces deux Femmes Belettes s'endorment alors, tournées vers l'est, où leurs deux étoiles chassent dans la nuit.
              C'est maintenant le matin. Sœur cadette s'étire sous ses fourrures; elle se réveille. Son pied heurte quelque chose.
              «Fais attention, s'écrie une petite voix glapissante. Tu as renversé le plat d'écorce de nepi'jekwati, le remède pour mes yeux.» Sœur cadette se redresse. Qui a parlé? À son côté se trouve un petit vieillard au visage ridé et aux yeux rougis. C'est la petite Personne Étoile rouge. Elle l'a fait venir pour être son mari en parlant dans la nuit. Elle a fait venir l'Étoile aux Yeux rougis.
              Maintenant Sœur aînée commence à s'éveiller. Elle bouge un peu sous ses couvertures. «Attention, femme!» fait une voix d'homme. C'est une voix forte et profonde. «Tu as renversé le plat d'écorce contenant mon sikwan, mon ocre rouge.» Sœur aînée se retourne et se redresse. À son côté, un homme est couché, un homme grand, un homme fort. Il a le visage peint à l'ocre rouge. C'est son Mari Étoile, qu'elle a fait venir en parlant dans la nuit. Elle a fait venir l'Étoile aux Yeux brillants. Ces deux Femmes Belettes se sont donc à nouveau fait attraper, et elles doivent être les épouses d'Étoiles.
              «Je n'ai rien à te donner à manger, dit Sœur aînée.
              Nous ne mangerons pas tant que nous ne serons pas rentrés de la chasse, réplique son mari. Vous pouvez ramasser du bois et entretenir le feu, et vous préparer à notre retour. Mais il y a une chose que vous ne devez pas faire.
              E'e, fait le mari de Sœur cadette, l'Étoile aux Yeux rougis. Il y a une chose que vous ne devez pas faire. Vous ne devez pas déplacer cette pierre plate qui se trouve devant le wigwam. Vous ne devez pas la déplacer, vous ne devez pas la soulever.
              Très bien, dit Sœur aînée. Nous vous préparerons un repas à votre retour.»
              Plusieurs jours passent. Les Femmes Belettes sortent à la recherche des sipeknk, les pénacs, les pommes de terre sauvages. Elles les déterrent, elles vont les cuire. Et Sœur cadette parle à nouveau.
              «Je me demande ce qu'il y a sous cette pierre plate?
              Ne touche pas à cette pierre plate», dit Sœur aînée.
              Mais Sœur cadette ne cesse d'en parler, et bientôt, jacassant jacassant, elle s'en approche, et bientôt, jacassant jacassant, elle y met les mains, et puis elle la soulève.
              Elle soulève la pierre et regarde dessous.
              «Qu'est-ce qu'il y a?» demande Sœur aînée.
              Sœur cadette pousse un cri.
              «Où sommes-nous? hurle Sœur cadette. Où sommes-nous, ma Sœur aînée?»
              Sœur aînée l'écarte et regarde sous la pierre, elle regarde pour voir ce qui fait crier de la sorte sa petite Sœur Belette. Et elle voit : elles sont dans le Monde-au-dessus-du-ciel. Elles se tiennent sur le ciel. La pierre bouche un trou dans le ciel, et par ce trou on peut voir, loin, loin, loin en bas, la terre, la forêt, le petit abri qu'elle a construit la nuit où, toutes deux étendues, elles parlaient ensemble des yeux des étoiles.
              Sœur aînée fond en larmes. Sœur cadette fond en larmes. Ces deux Femmes Belettes pleurent jusqu'à ce que leurs yeux en rougissent. Loin dans la forêt du Monde-au-dessus-du-ciel, les Maris Étoiles sont en train de chasser. Et ils commencent à se douter de quelque chose, à trouver que quelque chose ne tourne pas rond. Ils commencent à sentir que leurs femmes pleurent. «Il vaudrait mieux que nous rentrions», dit le Mari Étoile aux Yeux brillants. «Elles doivent avoir soulevé la pierre, dit l'Étoile aux Yeux rougis. Écoute-les pleurer.»
              Il fait presque nuit lorsque ces Personnes Étoiles sortent de la forêt. Leurs Épouses Belettes essaient de faire la cuisine, essaient de prétendre qu'il ne s'est rien passé.
              Mais les Personnes Étoiles ont du Pouvoir, et elles savent.
              «Qu'est-ce qui vous a inquiétées aujourd'hui? demandent-ils à leurs femmes. Pourquoi avez-vous pleuré?
              Tout va bien, répond Sœur cadette. Nous n'avons pas pleuré.
              Ah, fait le mari de Sœur aînée. Je pense que vous avez regardé par le trou dans le ciel. Je pense que vous avez soulevé la pierre et regardé d'en haut votre monde. Et je pense que vous vous sentez seules et voulez y retourner.»
              Sœur aînée lève le regard vers son Mari Étoile. Elle n'arrive pas à parler. Elle le regarde et des larmes se mettent à couler de ses yeux.
              «Très bien, lui dit-il. Vous pouvez retourner dans le monde terrestre.»
              La vieille Étoile aux Yeux rougis leur dit : «Ce soir, Femmes Belettes, vous devez dormir l'une à côté de l'autre. Vous devez garder vos couvertures de fourrure par-dessus vos têtes. Et au matin, quand le soleil sortira de dessous la terre, vous devez rester tout à fait immobiles. N'enlevez pas les couvertures sur vos têtes, n'ouvrez pas les yeux. D'abord, vous entendrez la mésange crier. Gardez les yeux fermés. Ensuite vous entendrez Apalpaqmej, Écureuil roux, vous l'entendrez chanter. N'ouvrez pas les yeux. Longtemps après, vous entendrez Atu'tuej, Suisse. Il chantera, et ensuite vous pourrez ouvrir les yeux.
              Si vous faites ainsi, dit le grand Mari Étoile, vous vous retrouverez dans votre abri, l'endroit où vous étiez couchées la nuit où vous nous avez invités à venir pour être vos maris.»
              Alors ces deux Femmes Belettes se couchent côte à côte et se couvrent la tête de couvertures. La nuit passe, et au matin elles entendent la mésange. Sœur cadette, toujours impatiente, veut se lever d'un bond, mais Sœur aînée la force à rester immobile. «Attends! Attends que nous ayons entendu Atu'tuej», dit-elle.
              Au bout d'un long moment, elles entendent chanter. Qu'est-ce que c'est? C'est Apalpaqmej, Écureuil roux. Et cette Sœur cadette, l'imprudente, cette Femme Belette idiote, saute sur ses pieds en entendant le bruit et rejette les couvertures. Et puis elle commence à pousser un cri perçant.
              «Où sommes-nous, ma Sœur aînée?»
              Sœur aînée soupire et ouvre les yeux. Le soleil est apparu de dessous la terre, et ces Femmes Belettes sont de retour dans leur monde, mais elles ont ouvert les yeux trop tôt en descendant, et elles se trouvent maintenant coincées au sommet d'un grand, grand pin, un kuow. Cet arbre n'a pas de branches, sauf quelques-unes tout en haut, et les deux femmes ne peuvent descendre.