leurs marchandises 1883-1935
La bataille des marques
À l’époque de l’âge d’or du cigare en Amérique du Nord, grosso modo de 1880 à 1930, le cabinet d’étalage des débits de tabac se transforme en champ de bataille pour le marchandisage des produits. Des rangées de boîtes à cigares entr’ouvertes disposées côte à côte se disputent l’attention des acheteurs.
Sur bon nombre des boîtes, le baratin publicitaire a peu, sinon rien, à voir avec les cigares. Les étiquettes attirent le regard des clients grâce à d’attrayantes illustrations en couleur de célébrités ou d’événements marquants de l’époque, voire de femmes séduisantes. De nos jours, ces étiquettes offrent un aperçu du Canada de l’époque (voir Sous le couvercle, le Canada raconté par les boîtes à cigares 1883-1935).
Mais d’autres fabricants de cigares adoptent une approche différente en choisissant de faire la promotion du produit lui‑même. Leurs étiquettes ne représentent pas des images de beautés locales, d’acteurs célèbres ou de politiciens. Ce qu’ils vendent, c’est un cigare, c’est de quoi fumer.
Les étiquettes de boîtes qui vantent les mérites du cigare lui même associent l’acheteur à l’expérience de fumer. Elles construisent autour du cigare un mythe sur ses origines tropicales (Cuba, de préférence) ou sa confection par de maîtres artisans. Les étiquettes font l’éloge d’un objet sensuel et désirable. La boîte à cigares se transforme en corne d’abondance dans un monde où tout le monde fume.
Et dans ce monde de fumeurs, affirme chaque étiquette de fabricant, leur cigare se démarque : c’est un prodige de l’agriculture, le chef-d'oeuvre d’un artisan, un miracle de la technologie, un premier prix international, un produit de luxe digne des riches et puissants, un cadeau des dieux.