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L'art haïda
Art haïda




   Les sociétés secrètes



(page 1)

Le pouvoir temporel dans la société haïda était exercé par les chefs, lesquels, contrairement à ceux de leurs voisins Kwakwaka'wakws (ou Kwakiutls) au sud, ne le cédaient jamais pour la durée de l'hiver aux chefs des sociétés secrètes. Néanmoins, vers le milieu du XVIIIe siècle, les Haïdas commencèrent à exécuter des formes très rudimentaires des danses d'hiver des sociétés secrètes, qu'ils avaient apprises de prisonniers capturés lors de guerres contre les Heiltsuks en particulier. Cependant, comme un grand nombre de ces prisonniers étaient de rang inférieur et n'avaient pas été pleinement initiés aux sociétés secrètes, les Haïdas copiaient des modèles mal compris. Tout comme les Tsimshians, les Haïdas connurent ces sociétés de danses d'hiver sur le tard et ne les enrichirent jamais. Le photographe Edward Curtis a fait observer que les Haïdas, qui avaient pourtant conservé les noms d'une douzaine de danses différentes et les exécutaient lors de toutes les festivités d'hiver, y compris celles qui marquaient l'érection d'un mât totémique ou la construction d'une maison, ne connaissaient guère les mythes et les principes ésotériques à la base des danses d'hiver.




VII-B-1554 Masque de société secrète avec peinture faciale et incrustations de cuivre. Les danseurs décoraient les masques de ces deux manières -- ils en peignaient le visage, et y fixaient aussi parfois des morceaux de cuivre et de coquilles d'haliotide avec de la colle de flétan. Ce masque a probablement été fait dans les années 1850 à des fins cérémonielles. Il a été abondamment garni de fourrure pour former une barbiche et un collier de barbe et marquer la naissance des cheveux, mais seul demeure le cuir auquel était autrefois fixée la fourrure.
Recueilli à Masset avant 1884 par Alexander McKenzie, de la Compagnie de la Baie d'Hudson
MCC VII-B-1554 (S85-3286)




Les Tsimshians ont un récit bien connu sur la façon dont des sociétés secrètes furent acquises par deux frères partis pêcher. La version haïda est différente : les sociétés secrètes y sont volées par un de leurs propres êtres surnaturels, Qingi, qui, parti de Haida Gwaii à bord d'une petite pirogue noire appelée Pirogue-Tabac, se rendit à la maison du Chef du Monde sous-marin. Une partie du long récit explique quelques particularités des chapeaux de danse haïdas :

Qi'ngi, assis tout seul d'un côté de la maison, ouvrait son sac par intervalles et en sortait un morceau de saumon séché, qu'il mangeait. À cause de cela, tous les êtres surnaturels riaient de lui. Puis il mit un haut chapeau de danse et commença à danser. Tout de suite ils entendirent les «esprits» (les sifflets de la société secrète) -- c'était la première fois que des êtres humains les entendaient. Ces sifflements étaient produits par des pics. Le chapeau de Qi'ngi se mit alors à grandir; et tandis qu'il grandissait, des goélands et des cormorans s'envolèrent d'entre les interstices et répandirent leurs excréments sur tout le monde, de sorte que les êtres surnaturels se couvrirent le visage. Bientôt son chapeau rapetissa, et il l'enleva.

Les êtres vivants passant par des interstices de la pile d'anneaux du chapeau de danse sont une référence à la croyance haïda que les anneaux représentent la colonne vertébrale d'êtres surnaturels et sont une source de vie nouvelle. Le récit prend fin avec la fuite de Qingi, qui emporte avec lui les nouvelles danses qu'il a vues pour les introduire chez les Haïdas.




VII-X-31
VII-B-129.2
Ornement en bois représentant une nageoire dorsale d'Épaulard avec mèches de cheveux humains. On attachait jusqu'à cinq de ces nageoires aux manteaux de danse, ou une seule sur la tête du danseur.

Objet d'une collection donnée au Musée, aucune donnée d'acquisition.
MCC VII-X-31 (S94-6783)
Lance de danse ayant appartenu à la Société des guerriers. On voit ici la lance entière ainsi qu'un gros plan de la pointe sculptée. Les lignes en spirale -- épaisses et fines en alternance -- imitent des motifs observés sur les pattes de tables et de fauteuils à bord de navires européens.

Recueillie en 1879 dans Haida Gwaii par Israel W. Powell.
MCC VII-B-129.2 (S4192.2)




Les Haïdas commencèrent à abandonner les danses d'hiver vers 1875, et ne les exécutèrent plus qu'en quelques occasions au cours des dix années suivantes. Rares sont donc les témoins qui ont pu décrire ces danses. Curtis a pu néanmoins trouver des Haïdas qui se rappelaient parfaitement les danses de leur enfance :

Les petits enfants pouvaient être initiés à la société [...] Ils passaient onze jours derrière le rideau, soi- disant morts durant huit jours et absents avec les esprits les trois autres jours, et lorsque la danse débutait ils sortaient et se tenaient devant le rideau [...]
S'étant retirés derrière le rideau, les initiés plus âgés demeuraient aussi dissimulés durant onze jours, sauf que le soir, les huit premiers jours, ils sortaient avec tout leur attirail et parcouraient le village en faisant des mouvement caractéristiques. Pendant la journée, eux aussi étaient censés être étendus, morts, derrière le rideau.
À la fin des huit jours, de nombreux sifflets résonnaient dans le bois, puis le son s'éloignait graduellement, et on disait que les esprits des initiés étaient emportés par des êtres surnaturels. Les initiés demeuraient cachés tout au long des trois jours suivants. Puis, le douzième matin, les initiés qui devaient jouer le rôle de danseurs apparaissaient sur la plage telles des créatures sauvages tout juste sorties des bois après leur absence avec les êtres surnaturels. Les membres de la fraternité se regroupaient pour les attraper avec des cordes et les traînaient dans une maison (pas le skasnai), derrière un rideau. Le soir, tous les gens, membres ou non de la société, se réunissaient dans le skasnai pour exorciser l'esprit qui possédait les initiés.
Les membres de sexe féminin dansaient représentant divers personnages, puis les initiés, que leurs aides faisaient entrer par la porte principale, dansaient autour du feu et se retiraient derrière le rideau. Ils réapparaissaient et dansaient plusieurs fois portant des costumes différents jusqu'à ce qu'on les ait «domptés». La nuit se passait à danser et à faire des tours de passe-passe, par exemple à faire semblant de décapiter un initié et de lui redonner la vie.


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