Portrait de Pierre-Georges Latécoère

Industriel français de 35 ans, Pierre-Georges Latécoère réunit intelligence, patriotisme et sens des affaires. Dès la Première Guerre mondiale, il transforme ses ateliers d'assemblage de wagons de chemins de fer en une usine de construction aéronautique qui devient la plus importante de France.

Pierre-Georges Latécoère
Pierre-Georges Latécoère, fondateur de la Ligne
Gracieuseté du Musée Air France
Latécoère caresse le projet fou d'établir une ligne aérienne reliant l'Europe, l'Afrique et l'Amérique du Sud et cela alors que l'avion n'a pas encore traversé l'Atlantique. Surpris qu'un homme à l'esprit aussi pragmatique défende une idée aussi peu réaliste au moment où la guerre fait encore rage, les représentants du gouvernement français lui opposent tout d'abord une prudente réserve.

Latécoère poursuit cependant son projet. La guerre apporte la preuve des possibilités de l'aviation. En effet, avant même que soit conclu l'armistice, on effectue quelques liaisons aéropostales, irrégulières et provisoires, à des fins militaires pour la plupart. Latécoère envisage, dès le départ, de créer une route aéropostale de 13 000 km reliant Toulouse à la Terre de Feu.

Essais de charge
Essais de charge sur un stabilisateur à Toulouse en 1923.
L'industriel français Pierre-Georges Latécoère se lance dans la construction aéronautique en 1917.
Gracieuseté des Archives Latécoère
Selon ses plans, Dakar est le point de départ d'une ligne transatlantique qui rattache tout un réseau de routes aériennes vers la côte est de l'Amérique du Sud. À l'époque, Latécoère passe pour un illuminé de vouloir créer une ligne qui franchit les Pyrénées, l'Espagne et le Sahara. Il s'obstine et achète plusieurs biplans Salmson, des avions de guerre qu'il transforme en avions commerciaux. Le Maroc avec ses 80 000 Européens offre un marché d'envergure. Les principales villes du Maroc sont reliées par bateau et par train. À cette époque, l'Amérique du Sud échange 2 000 tonnes de lettres avec l'Europe. Ces échanges entre Paris et Buenos Aires ou Rio se chiffrent à 50 milliards de francs par an. Le 11 novembre 1918, jour de la signature de l'armistice, Latécoère crée sa société, la Latécoère-Compagnie générale d'entreprises aéronautiques. « J'ai refait tous mes calculs, lance-t-il, ils confirment les opinions des spécialistes : mon idée est irréalisable. Il ne me reste plus qu'une chose : la réaliser. »

Le 25 décembre 1918, Latécoère décide d'ouvrir lui-même la première étape de ce qui sera appelé la «Ligne». À bord d'un Salmson 2 militaire, il décolle de Toulouse avec le pilote René Cornemont. Après 2 h 20 d'un vol sans histoire, l'avion se pose à Barcelone. La deuxième étape consiste à relier Barcelone à Alicante, en Espagne. Le 3 mars 1919, deux Salmson l'un piloté par Paul Junquet et Latécoère et l'autre par Henri Lemaître et Beppo di Massimi s'envolent sous une pluie diluvienne. Les avions atterrissent en catastrophe, mais tous sont indemnes. Le rêve est réalisable. Le 7 juillet 1919, le gouvernement français lui accorde par contrat le droit d'exploitation de la ligne Toulouse-Rabat pendant cinq ans.