Bibliographie Carte Index des photos Remerciements

Chez Henri
179, promenade du Portage

Hôtel Chez Henri

La structure précédant le bâtiment actuel est incendiée dans le grand feu du 26 avril 1900. Louis Duhamel, médecin, député du comté d'Ottawa de 1875 à 1886, puis protonotaire au Bureau d'enregistrement, de 1886 à son décès, en 1915, y vivait depuis 1882. Lors du transfert du Bureau d'enregistrement dans sa maison, en 1888, il en fait inscrire l'affiche en français; c'était une première. Les deux premiers étages du bâtiment actuel sont construits en 1901 pour Duhamel et son épouse, Exilda Lapierre dite Mazurette, et leurs deux enfants, Oscar, et Rachel. Le premier, malade, ne survivra pas à son père, qui lèguera alors la propriété à sa fille.

Louis de Gonzague Raby, nommé protonotaire en 1916, achète la maison de Rachel Duhamel en février 1917 et, en septembre, épouse Alexina Bourque, fille de l'entrepreneur Joseph Bourque. Deux ans plus tard, ils quittent la résidence de la rue Principale où s'établiront des études légales. Jean Lacroix et J.-Adélard Tessier acquièrent la propriété en 1922 sans toutefois l'habiter. En 1924, Tessier transfère ses parts à un certain Mary Pichard, un épicier.

En octobre 1928, Henri Burger, le chef internationalement reconnu, achète la maison. Né en Suisse en 1879, il émigre à New York en 1895 et y apprend son métier auprès des grands cuisiniers Escoffier et Ballard. En 1910, il s'installe à Montréal, puis à Ottawa, où il travaille au Château Laurier. Il ouvre son premier restaurant au 127, rue Principale, à Hull, en 1922. Sa personnalité charmante et ses talents attirent une clientèle de marque. Il s'associe à des hommes d'affaires et, le 2 mai 1929, fonde la compagnie Chez Henri Limited dont il est le président.

Chez Henri ouvre ses portes en 1929, dans un contexte social particulier. La prohibition, qui sévit partout en Amérique du Nord (1919-1933) ? surtout en Ontario où s'applique la loi de la Tempérance de 1916 ? mais non au Québec, incite les investisseurs à établir des hôtels en territoire hullois. La loi québécoise exige que ces établissements aient au moins 20 chambres pour qu'il leur soit permis de vendre de l'alcool. De belles résidences, comme celle de E. B. Eddy, sont agrandies pour répondre à la demande. À l'automne 1930, la compagnie Chez Henri fait de même et engage les architectes Richard & Abra, ainsi que l'entrepreneur Théodore Lambert, qui est aussi maire de Hull, pour transformer la maison, à laquelle on ajoute un étage et une toiture pour lui donner un style « château renaissance ». L'intérieur luxueux offre une atmosphère très parisienne. À la fine pointe de la technologie, on installe des téléphones dans les 32 chambres et le Salon d'Or, la salle à dîner, a une haute réputation. La tenue vestimentaire formelle y est de mise. Chez Henri Hôtel et Café offre des dîners d'hommes d'affaires et une fine cuisine française.

Effet de la crise économique ? En 1932, Henri Burger quitte l'hôtel et la compagnie, en faillite. Il ouvre, rue Laval, un nouveau restaurant, le Café Henri Burger. Il meurt en novembre 1936, à Hull, âgé de 59 ans.

Une nouvelle compagnie, la Hôtels Chez Henri Ltée, obtient son brevet d'affaires le 16 février 1933 et, le 25 mars, achète l'hôtel des syndics de l'ancienne société. Il y eut plusieurs actionnaires dans la nouvelle compagnie, ce qui entraîna parfois des méprises sur l'identité du propriétaire de l'hôtel. Certains firent en sorte d'être davantage connus. Ainsi, en 1935, un associé, Frederick G. Johnston, un lieutenant-colonel qui a participé à la Première Guerre mondiale, est connu comme en étant le propriétaire. Il engage un gérant « flamboyant », Charles Swan, qui, pour attirer la clientèle de l'Ontario, organise à l'hôtel des « spectacles » et de la danse.

Le plus célèbre des propriétaires est sans aucun doute James Patrick Maloney (1894-1983), qui possède aussi le Standish Hall. Il devient partenaire de la société Hôtels Chez Henri Ltée et acquiert les titres des Johnston en décembre 1943. Maloney est un maître en matière de transactions immobilières. Il emprunte, vend, transfère, mais, finalement, dans le cas de l'hôtel, il en aurait conservé la propriété jusqu'à la veille de son décès. Le 30 décembre 1982, la compagnie vend l'édifice à la compagnie Hôtel Standish Hall Inc., propriété de Maloney. Ce dernier décède le 10 avril suivant, dans son appartement terrasse, sur le toit de l'hôtel.

Pendant de nombreuses années, l'hôtel est attire une clientèle particulière, celle des juges et des avocats du palais de Justice, situé en face, mais aussi celle d'autres personnages dont la réputation serait moins reluisante... En 1984, Denis Cayer et Walter Grego achètent le bâtiment et affirment vouloir y redonner son lustre d'antan. Ce ne fut malheureusement pas le cas et l'intérieur fut démoli. La faune nocturne des années 1990 finit par entraîner la fermeture du bâtiment. La Ville de Gatineau l'a cité monument historique en janvier 2003.



retourner à l'INTRODUCTION