l'aube des années 1880, il devenait impossible de fermer les yeux devant les signes évidents de l'implantation de la révolution industrielle au Canada. La production manufacturière augmentait à un rythme effréné et les industries minières, forestières et autres industries primaires prenaient de l'essor un peu partout au Canada. Certaines de ces entreprises, déjà vastes et complexes, embauchaient des centaines de travailleurs.

Cette ère nouvelle n'était pas nécessairement joyeuse pour un grand nombre des travailleurs industriels de la première génération au Canada. Les conditions de travail étaient dures dans de nombreuses mines et usines. Les travailleurs se plaignaient de la longueur de leur journée de travail, de leur maigre salaire et de l'instabilité de leur emploi. Leur vie en dehors de l'usine était, elle aussi, souvent difficile. Beaucoup d'ouvriers devaient rentrer chaque soir dans un quartier surpeuplé et démuni de services, comme l'eau courante et les égouts. Les rapports selon lesquels des maladies se propageaient dans les quartiers ouvriers de Montréal, de Toronto et de nombreuses autres villes sonnèrent l'alarme en faveur d'une réforme du milieu urbain.

Les travailleurs, poussés à bout par des conditions de travail intolérables, créèrent parfois des comités internes afin de faire valoir leur cause devant leur employeur. Occasionnellement, ils allèrent jusqu'à faire la grève. Les femmes, qui jusqu'alors n'avaient eu que très peu d'expérience syndicale, s'avérèrent étonnamment militantes dans ces situations. C'est ainsi que dans l'industrie du textile, des bottes et des chaussures, tout comme dans l'industrie du tabac, les travailleuses déclenchèrent, dans les années 1880, des grèves dans plusieurs villes du Canada et des Maritimes. Toutefois, ces tactiques furent rarement fructueuses à long terme face à l'organisation et au pouvoir toujours grandissants des manufacturiers.

Devant un tel phénomène, les travailleurs mirent à l'essai différents types d'organisations. Certains essayèrent, sans grand succès, de créer des syndicats de métier. D'autres tentèrent des expériences totalement nouvelles. En Nouvelle-Écosse, les mineurs créèrent une association provinciale des ouvriers (Provincial Workmen's Association ou PWA). Cette association s'adjoignit peu à peu plusieurs loges d'ouvriers dans le domaine de la verrerie, de la fonderie et des bottes et chaussures. La PWA parvint à obtenir des exploitants miniers certaines concessions importantes en matière de sécurité. Le syndicat proposa aussi des candidats aux élections locales et provinciales, une pratique peu fréquente au Canada avant cette époque. Grâce au militantisme de la PWA en milieu de travail et à sa visibilité dans la politique provinciale, le gouvernement procéda à d'importants ajustements dans les règlements régissant le secteur minier.



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