En 1949, dans le cadre d’un sondage Gallup effectué juste après l’élection fédérale, on demande à la population canadienne si elle soutiendrait un régime d’assurance maladie qu’administrerait le gouvernement et auquel elle verserait une cotisation mensuelle. Tout comme en 1944, 80 % des répondants sont d’accord; seulement 16 % s’y opposent. Cela veut-il dire que les gens considèrent dorénavant les services médicaux et hospitaliers comme une nécessité sociale, plutôt qu’un produit achetable ? Veulent-ils que le Canada imite le nouveau Service de santé national britannique, qui offre des soins complets à tous ? Ou le modèle américain, qui repose sur le principe du tiers payant, prévaudra-t-il ? Ce sont les questions que se posent les autorités et les politiciens fédéraux et provinciaux face à une conjoncture qui évolue rapidement dans les années 1950.
Compte tenu de l’énorme appui du public dont jouirait un régime d’assurance maladie national, pourquoi le gouvernement fédéral hésite-t-il tant à remplir ses promesses antérieures ? En effet, au cours de la campagne électorale de 1949, les rogressistes conservateurs, la Fédération du commonwealth coopératif (CCF) et le Social Credit Party se sont tous dits en faveur d’un régime d’assurance maladie national. Cependant, ce genre d’unanimité liée à l’élection diminue nettement au cours de la décennie suivante, la population du pays vivant une période de croissance économique et démographique sans précédent. La récession que tous craignaient après la guerre n’a pas eu lieu et, avec le début du baby-boom, en 1946-1947, et une immigration massive dans les années 1950, les gouvernements fédéral et provinciaux doivent répondre à d’autres besoins, puisque la population passe de 14 à 18 millions d’habitants entre 1951 et 1961.