La chambre de l'aile Ouest : la journée morose des adieux

(Xi xiang ji chang ting fen bie)

Volumes 1 et 2 sur 5 Volumes 3 et 4 sur 5Volume 5 sur 5 (côté B est vide)



L'histoire d'amour de Cui Yingying et Zhang Junrui est très populaire en Chine. L'intrigue de cette pièce fut tirée d'un roman, Biographie de Yingying, écrit par Yuan Zhen, célèbre poète de la dynastie des Tang (618-907 apr. J.-C.). Il s'agit d'une tragédie basée sur les expériences du poète qui se termine par la séparation des amoureux. Sous la dynastie des Jin fondée par les Jürchens (1115-1234 apr. J.-C.), Dong Xieyuan écrit une version connue sous le titre de Paroles de la chambre de l'Ouest et en change la fin pour que les amoureux se réunissent. Sous la dynastie des Yuan (1279-1368 apr. J.-C.), Wang Shipu, dramaturge bien connu, réorganise l'histoire pour en faire cinq feuilletons opératiques plus ou moins indépendants. Il s'épuise et meurt subitement pendant qu'il écrit le cinquième feuilleton. Guan Hanqing, autre dramaturge qui a signé nombre d'œuvres importantes, termine la pièce de Wang Shipu.

Les écrivains sympathisent avec les jeunes amoureux, qui osent remettre en question l'éthique et les traditions de la Chine féodale. Il s'agit de l'histoire d'un coup de foudre, d'une promesse non tenue, des efforts faits pour vaincre l'opposition de la famille, et de la poursuite intrépide de l'amour et de la liberté. L'histoire se trouve dans bien des formes d'art en Chine et fait partie du répertoire de beaucoup de troupes d'opéra régionales.

Au début de la dynastie des Tang (618-907 apr. J.-C.), il y a, dans la région de Hezhong, le célèbre temple de Puguo, construit par le premier ministre Cui. Ce dernier meurt peu après la construction du temple. Selon la tradition, madame Cui et sa fille Yingying, accompagnées par leur servante, Hongniang, vivent pendant un certain temps dans la chambre de l'Ouest du temple pour pleurer la mort de Cui. Zhang Junrui, jeune lettré qui se rend à la capitale pour passer les examens de la fonction publique impériale, s'arrête au temple et rencontre Yingying, qui brûle de l'encens dans le jardin à la mémoire de son père. Les deux ont un coup de foudre. Quand Sun Feihu, chef de bandits, apprend que Yingying – une belle fille appartenant à une grande famille – est dans le temple, il entoure le temple, aidé de ses hommes, et exige qu'on lui donne la fille. Prise de panique, madame Cui offre sa fille à quiconque les tirera d'affaire. Zhang écrit tout de suite une lettre à son ami, le général Du.

Avec l'aide d'un moine, la lettre parvient à destination, et le général arrive avec ses troupes. Après le départ des bandits, au lieu de les déclarer mari et femme, madame Cui propose que Zhang et Yingying se considèrent comme frère et sœur. Elle dit qu'elle a réfléchi à sa promesse hâtive et ne donnera pas sa fille à quelqu'un qui n'a pas de statut social ou financier. Zhang a la mort dans l'âme. Il essaie de rendre visite à madame Cui et à Yingying, mais on l'empêche de le faire. La servante de Yingying, Hongniang, sert d'intermédiaire entre les amoureux et livre les lettres d'amour qu'ils s'écrivent. Avec son aide, Zhang et Yingying réussissent à se voir une nuit et jurent de s'aimer pour toujours. Pour prouver son amour, Zhang laisse Yingying temporairement et se rend à la capitale, où il espère se distinguer à l'examen de la fonction publique afin d'impressionner la mère et la famille de Yingying.

Le procédé poétique de la séparation douloureuse est employé dans cet épisode de la journée morose des adieux. C'est un épisode qui comporte beaucoup de poésie classique ainsi que des expressions familières et littéraires. Yingying fait halte sous un abri au bord de la route pour dire au revoir à son amant. En cet après-midi typique de la fin de l'automne, le vent froid fait virevolter les feuilles mortes. Des nuages traînent dans un ciel obscurci à des milliers de kilomètres de distance, et dans les champs, les chrysanthèmes sauvages sont encore en fleurs. Les vents d'ouest soufflent, et les oies sauvages volent vers le sud. Yingying se lamente : « Avez-vous vu le rouge intense des feuilles sous la rosée du matin? Est-ce la couleur du sang et des larmes de mon amant? »