La lutte pour l’inclusion sociale : la perspective des Canadiens d’origine asiatique
Le mois de mai est le Mois du patrimoine asiatique. C’est l’occasion de réfléchir aux contributions des Canadiens d’origine asiatique à notre pays; contributions qui ont souvent été marquées par un contexte de discrimination. La nouvelle salle de l’Histoire canadienne présente des perspectives importantes sur l’histoire complexe de la diversité ethnique croissante de la population canadienne au xxe siècle.
La troisième galerie de la salle – le Canada moderne – porte principalement sur la manière dont les luttes politiques et sociales, ainsi que l’évolution des normes sociales, ont contribué à l’extension des droits et à une meilleure inclusion sociale au cours du siècle dernier. Cette question de l’adaptation aux différences est d’ailleurs toujours d’actualité au Canada. Les expériences et les témoignages de Canadiens d’origine asiatique sont, à ce sujet, très éloquents.
Durant la première moitié du xxe siècle, la société canadienne n’était ni inclusive ni tolérante, et ce, à bien des égards. La politique d’immigration du Canada et les attitudes sociales envers les communautés ethniques et les minorités au début des années 1900 en témoignent bien. L’histoire du Komagata Maru, un navire transportant majoritairement des migrants sikhs tentant, en vain, de défier les politiques restrictives liées à l’immigration asiatique en 1914, est un exemple de la manière dont l’exposition explore certaines réactions quant aux questions de race et de religion.
La politique du gouvernement à l’égard de l’immigration chinoise au Canada reflétait la discrimination raciale de l’époque. La Chinese Head Tax (impôt par tête), mise en place une fois achevée la construction du chemin de fer du Canadien Pacifique, a été systématiquement augmentée au début des années 1900. Le gouvernement fédéral est allé encore plus loin en adoptant, en 1923, la Loi de l’immigration chinoise, également connue sous le nom de Loi sur l’exclusion des Chinois. Cette loi, qui interdisait purement et simplement l’immigration en provenance de Chine, est restée en vigueur jusqu’en 1947.
Dans la période de l’entre-deux-guerres, les Canadiens d’origine chinoise ont fait preuve de solidarité et se sont battus pour leurs droits par le truchement de différentes associations communautaires. L’équipe de soccer des étudiants chinois, basée à Vancouver (Colombie-Britannique), est un exemple tangible de cette résilience. Formée en 1920, l’équipe a remporté la prestigieuse coupe Mainland en 1933, transcendant les préjugés et les frontières raciales de l’époque : Chinois et Blancs étaient au moins égaux sur le terrain. L’héritage de ces politiques est, lui aussi, un élément important de l’exposition. Lors des excuses présentées en 2006 par le gouvernement fédéral concernant la taxe d’entrée, le crampon cérémonial remis au premier ministre Stephen Harper par des représentants des Canadiens d’origine chinoise se voulait un symbole fort de la présence historique de la communauté canadienne d’origine chinoise et de ses contributions à la société.
Pendant la Seconde Guerre mondiale, un mélange de racisme et de craintes quant à la sécurité intérieure a conduit le gouvernement canadien à recourir à la Loi sur les mesures de guerre afin d’interner et de déplacer des milliers de Canadiens d’origine japonaise, tout en révoquant leur droit de vote. Une fois la guerre terminée, un changement de mentalité et des efforts soutenus de communautés militant en faveur de l’égalité ont permis au principe de citoyenneté et au droit de vote de devenir plus inclusifs. La législation restrictive sur l’immigration chinoise, les règlements sur la déportation de Canadiens d’origine japonaise et les autres mesures discriminatoires ont pu être levés.
Dans le contexte d’après-guerre, les Canadiens se sont employés à accroître la reconnaissance sociale et juridique des droits et des identités, contribuant à faire du Canada un pays de plus en plus ouvert, accueillant et diversifié. Lorsque Baltej Singh Dhillon a présenté sa demande d’admission à la GRC en 1988, le port du turban (un élément fondamental de la religion sikhe) avec son uniforme lui a été interdit. Dhillon s’est élevé contre cette politique, et un débat public houleux s’en est suivi, la proposition d’apporter des changements à l’uniforme de la GRC suscitant une vaste opposition. En 1990, le gouvernement fédéral est intervenu et la GRC a dû modifier sa politique afin de permettre l’intégration du turban sikh. Le conflit provoqué par la lutte de Singh et son issue favorable sont représentés dans la salle, dans laquelle l’un des uniformes de la GRC portés par Singh, avec son turban officiel, ainsi que des exemples d’épinglettes émises par des organismes opposés à ce changement sont présentés.
La salle de l’Histoire canadienne vise à présenter au public des perspectives et des expériences multiples afin de raconter des histoires de réussites, de luttes, de défis, de pertes, de réalisations et d’espoirs qui ont façonné – et qui continuent de façonner – l’histoire du Canada. Certains récits de Canadiens d’origine asiatique illustrent bien la manière dont cette approche a pu donner forme à l’exposition.