Gravé dans la pierre - une tournée architecturale du Musée canadien des civilisations

VISITE COMPLÈTE

L'architecte -
DOUGLAS CARDINAL

Le choix de Cardinal fut accueilli avec un certain étonnement dans le monde de l'architecture. Installé à Edmonton et encore peu réputé à l'échelle nationale, Douglas Cardinal s'était fait connaître auparavant surtout dans sa province natale de l'Alberta. Dès cette époque pourtant, il s'était démarqué par son style très personnel, et de nombreux ouvrages sur l'architecture moderne avaient reconnu l'importance de ses œuvres albertaines.

Douglas Cardinal, architecte designer du musée.
© Musée canadien des civilisations, K2004-412, CD2004-1377
Douglas Cardinal - K2004-412, CD2004-1377

Parmi celles-ci, la St. Mary's Roman Catholic Church, commencée en 1967 à Red Deer, ville où Cardinal passa son enfance, fut la première à attirer l'attention. Ses formes ondulantes, l'effet spectaculaire de la lumière sur l'autel et le lutrin, et l'utilisation ingénieuse de la brique - éléments qui allaient devenir caractéristiques du style de Cardinal - apparurent à la critique comme l'expression d'une alliance entre la contemplation et la sensualité. Par la suite, d'autres réalisations de Cardinal (le collège régional de Grande Prairie, centre récréatif, culturel et éducatif local, l'Alberta Government Services Centre à Ponoka, le St. Albert Civil and Cultural Centre et la résidence de l'architecte à Stony Plain) mettront également en honneur la beauté des lignes courbes, tandis que le Space Sciences Centre d'Edmonton, édifice futuriste doté d'un cinéma IMAXMD, révélera une autre facette du talent de l'architecte.

L'architecture de Cardinal se caractérise par la douceur de ses formes curvilignes et l'emploi de matériaux aux tons de terre. Ses immeubles rappellent les formations naturelles du pays.


Cardinal Studio,
Stony Plain (Alberta).

© George F. MacDonald
Cardinal Studio - © George F. MacDonald
St. Albert's Place,
St. Albert (Alberta).

© George F. MacDonald
St. Albert's Place - © George F. MacDonald
Edmonton Space Sciences Centre, Edmonton (Alberta).
© George F. MacDonald
Edmonton Space Sciences Centre - © George F. MacDonald

Cardinal s'inspire de la nature. Il estime que l'architecte doit avant tout parvenir à comprendre et à « sentir » le paysage environnant afin de travailler avec les formes sculpturales, vivantes et dynamiques que lui offre la nature :

« Au lieu de voir le musée comme un problème de sculpture, au lieu de recenser les formes historiques pour en tirer un vocabulaire de solutions, je préfère aller marcher dans la nature, observer comment elle résout ses problèmes et m'en inspirer dans mon travail. [...] Nos constructions doivent faire partie de la nature, en découler; elles doivent former un tissu avec le paysage de sorte que, même dans les rigueurs de l'hiver, nous puissions garder nos liens étroits avec la nature. »

Cardinal dessine de gigantesques structures en terre qui semblent sorties du sol, et dont les formes curvilignes utilisent les variations de la lumière et de l'ombre, les diverses textures de la brique, de la pierre et de la tuile pour donner aux revêtements extérieurs les tons naturels de la terre. Humanité et noblesse se dégagent de ce style. Pour Cardinal, les besoins de l'être humain n'ont pas moins d'importance en architecture que les nécessités structurales et fonctionnelles :

« J'ai toujours soutenu que les efforts de tous les Canadiens devraient tendre à améliorer la condition humaine. Dans mon travail de planificateur, d'architecte et de coordonnateur d'une équipe technique, je vois une occasion extraordinaire de mettre au premier plan les besoins de l'individu et de réaffirmer l'importance centrale de l'élément humain dans tous nos efforts. Je crois qu'en plaçant les besoins de l'homme avant les systèmes modernes créés par lui, nous pouvons mettre ceux-ci à notre service au lieu d'en devenir les esclaves. »
Les formes amples et curvilignes des premières esquisses impressionnistes faites par Cardinal pour le Musée rappellent l'œuvre d'une autre autochtone, Alex Janvier.

« J'ai rencontré Alex Janvier, relate Douglas Cardinal, il y a de cela vingt ans, et il a été pour moi une source d'inspiration par la manière dont son art stylise les formes de la nature... J'admire et je respecte l'œuvre de Janvier depuis toujours et je sens que nous avons suivi des chemins parallèles - lui en tant qu'artiste, et moi en tant qu'architecte. Nous utilisons tous deux les enseignements traditionnels comme base pour ce que nous créons. »


Un des premiers croquis - © Douglas J. Cardinal Architect Ltd.
L'un des premiers croquis du Musée esquissé par M. Cardinal.
© Douglas J. Cardinal Architect Ltd.

L'Hiver - MCC VI-D-223 - S83-213, CD94-345-025
L'Hiver, par Alex Janvier
MCC VI-D-223

© Alex Janvier - S83-213, CD94-345-025

L'ascendance autochtone de Cardinal n'est certes pas étrangère à ses idées, en particulier lorsqu'il définit l'architecture comme un acte spirituel. De fait, les formes liquides et mouvantes de ses premiers dessins du MCC ne sont pas sans rappeler les peintures de l'artiste tchippewayan Alex Janvier, chez qui l'on retrouve la même sensibilité pour la ligne et la forme. Certes, on pourrait trouver logique que l'architecte d'un musée national abritant des objets amérindiens soit lui-même issu de la société autochtone canadienne, mais cela n'a pas influencé sa sélection.

Un facteur qui, entre autres, a joué en faveur de Cardinal, fut sa réputation d'utiliser dans son travail les techniques les plus modernes. En effet, la firme de Cardinal a été une des pionnières de la conception assistée par ordinateur (CAO) au Canada. Reconnue en Amérique du Nord comme un chef de file dans ce domaine, elle en a exploré toutes les possibilités et repoussé les limites. Les formes serpentines et complexes imaginées par Cardinal posent de difficiles problèmes de géométrie : pour réaliser le toit en forme de tente de l'église de Red Deer, par exemple, il a fallu 82 000 équations simultanées. Afin de venir à bout de ces difficultés et de tenir compte des fréquentes modifications et des répétitions exigées par le dessin technique, la CAO était la solution tout indiquée. Assurant un travail précis, rapide et coordonné, elle supprime d'ennuyeuses tâches manuelles et permet de consacrer plus de temps au perfectionnement des dessins. Mais, bien entendu, la CAO n'est pas en soi le gage d'une architecture de qualité supérieure. Celle-ci est toujours le fait du talent de l'architecte.

CAO - © Douglas J. Cardinal Architect Ltd.
Le CAO a aidé Cardinal à dessiner la géométrie complexe du MCC, à corriger les dessins en cours de route et à produire rapidement des plans à jour.
© Douglas J. Cardinal Architect Ltd.



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