Un livre au service d’une cause : le rôle des Canadiennes durant les conflits mondiaux.

Pierre M. Desrosiers

Material Traces of War

Material Traces of War

Certains livres sont plus que des livres. L’ouvrage présenté ici représente une cause : celle d’une plus grande reconnaissance du rôle joué par les femmes durant les deux guerres mondiales. Material Traces of War : Stories of Canadian Women and Conflict, 1914–1945 est l’un des plus récents livres de la collection Mercure. En partant d’artéfacts, les autrices Stacey Barker, Krista Cooke et Molly McCullough retracent des histoires extrêmement diversifiées de l’expérience de Canadiennes à l’étranger et au pays. Elles nous racontent l’intensité de ces expériences, qui changeront à jamais la vie des femmes au Canada.

Uniforme de la Wren en chef Lorna Stanger.

Uniforme de la Wren en chef Lorna Stanger. Source: Musée canadien de la guerre 19790488-001-003, 19790488_005-4.

Des artéfacts qui reprennent vie

Les artéfacts ont une âme qui demeure vivante tant que l’on se souvient de leur histoire. S’inspirant d’une exposition, les autrices ont voulu aller plus loin, plus en profondeur, avec plus de détails sur les drames, les aventures, l’impact et les conséquences que révèlent ces objets sur une société qui évoluait à toute vitesse. Cet ouvrage remarquable tisse des liens entre des photos, des archives, des objets et des vies pour raconter des histoires qui ne seront jamais oubliées. Ce travail de mémoire redonne vie à ces objets et inspire le respect. Des yeux en verre créés par Kathleen McGrath à la boite à lunch de Nora Gibson, en passant par une page en japonais où Tsune Yatabe relate ses souvenirs du temps où elle était infirmière durant la pandémie de grippe espagnole, l’uniforme de service de Lorna Stanger, les lettres de la sergente Helen Walter, l’album de souvenirs d’Alta Wilkinson, la boite d’effets personnels du lieutenant William Robert Boucher, ces objets vous feront passer par toute une gamme d’émotions.

C’est là la grande originalité de cet ouvrage, qui part d’objets pour mieux comprendre l’expérience des femmes durant la guerre. Le livre présente un intérêt tant pour les personnes qui s’intéressent aux grands conflits mondiaux, à l’histoire et à l’évolution du rôle des femmes dans la société que pour ceux et celles qui cherchent des exemples de pratiques muséales remarquables.

« Parce que nous abordons l’écriture en tant que professionnelles de musée, nous jugions important de communiquer ces expériences d’une manière accessible qui résonne viscéralement avec le lectorat. La meilleure façon de le faire, selon nous, était d’écrire sur des femmes en particulier et de concrétiser leur histoire à travers des objets qui leur étaient associés. » Molly McCullough

Lieutenante Joan Bamford Fletcher, 1943. Source: Collection d’archives George-Metcalf.

Lieutenante Joan Bamford Fletcher, 1943. Source: Collection d’archives George-Metcalf. Musée canadien de la guerre 19800177-004_1.

Une diversité de contextes

Les nombreux récits présentés dans ce livre reflètent l’étendue et les nombreuses répercussions des deux conflits mondiaux sur les femmes de partout au pays. Que ce soit Michiko Ishii, encore adolescente, posant avec ses amis dans le camp de Lemon Creek durant la Seconde Guerre mondiale, Dorothy Cannon, âgée de sept ans en 1936 lorsqu’elle a accompagné son père sur le sentier du Souvenir dans le nord de la France, ou encore Inge Oswald, enrôlée dans l’Ontario Farm Service Force, les expériences sont incroyablement variées. Il y a également la lieutenant Joan Bamford Fletcher, qui a escorté 2 000 Néerlandais à travers le Sumatra pendant six semaines en 1945, sous la menace constante de groupes hostiles. Elle commandait des soldats japonais, des hommes qui allaient plus tard lui remettre un katana en signe de respect.

« Nous voulions couvrir un éventail d’expériences, des plus représentatives aux plus atypiques, tout en choisissant des histoires associées à des objets intéressants, avec divers niveaux de sens. » Stacey Barker

Le katana du lieutenant Joan Bamford Fletcher.

Le katana du lieutenant Joan Bamford Fletcher. Source: Canadian War Museum 19800177-001.

Une ère nouvelle

Les deux guerres mondiales ont entrainé les femmes vers une ère nouvelle. À cette époque, l’inconcevable allait vite devenir normal… du moins jusqu’à la fin des conflits.

« Devant la pénurie de personnes qualifiées, il n’importait plus de savoir si les douilles étaient remplies par des hommes ou des femmes, ou si les boulons des chaines de montage d’avions étaient serrés par des doigts masculins ou féminins. (…) » Charlotte Gray (traduit de l’avant-propos du livre)

« En 1944, les manufactures de tout le pays employaient des femmes de tout âge, race et situation familiale afin de maintenir la production. » Krista Cooke

« Mais à quoi ressemblerait le quotidien pour les femmes après la guerre? Elles avaient fait des progrès considérables pendant la guerre. Elles avaient revendiqué des rôles actifs, en ont créé quelques-uns de leur propre chef et ont profité de nouvelles possibilités. » (Traduit de Barker et coll. 2021, p. 257)

Les autrices

  • Stacey Barker est historienne au Musée canadien de la guerre. Elle est titulaire d’un doctorat en histoire de l’Université d’Ottawa et travaille comme historienne publique depuis plus de dix ans.
  • Krista Cooke est conservatrice pour Parcs Canada et possède plus de 20 ans d’expérience dans des musées et archives au Canada. Elle s’intéresse à la représentation muséale de l’histoire des femmes dans les expositions, les collections et les programmes.
  • Molly McCullough est conservatrice adjointe de l’agriculture et de l’environnement pour Ingenium – Musées des sciences et de l’innovation du Canada.

Pour en savoir plus sur la collection Mercure et en acquérir les publications, rendez-vous à la boutique en ligne.

Pierre M. Desrosiers

Pierre M. Desrosiers

Lectures complémentaires :

Pierre M. Desrosiers est directeur de rédaction de la collection Mercure et conservateur, Archéologie centrale, au Musée canadien de l’histoire.

Série Mercure

Série Mercure

La collection Mercure célèbre son 50e anniversaire en 2022. À sa création, la collection se caractérisait par un style minimaliste et un travail éditorial sommaire en vue d’une diffusion rapide, mais elle a depuis évolué en une vaste production haut de gamme d’ouvrages évalués par un comité de lecture. La collection Mercure compte aujourd’hui près de 500 volumes, dont des ouvrages novateurs sur l’histoire, l’archéologie, la culture et l’ethnologie canadiennes.

Elle est copubliée par le Musée canadien de l’histoire et les Presses de l’Université d’Ottawa.